lundi 15 juillet 2013

Des Fab Labs en entreprise ?


Ateliers ouverts dédiés au prototypage rapide, les Fab Labs se multiplient et s’interconnectent partout dans le monde (voir le "Tour d’horizon des Fab Labs", rapport de la Fing ou le livre de Fabien Eychenne, auteur de ce même rapport Fab Lab : l’avant-garde de la nouvelle révolution industrielle). On les rencontre aussi bien dans les capitales de pays en développement que sur des campus universitaires, ou des quartiers branchés des villes californiennes. Les pratiques à l’oeuvre dans ces différentes formes d’espaces intéressent de plus en plus les entreprises : innovation ouverte, collaboration entre pairs, prototypage rapide en mode “essai-erreur”, documentation ouverte des projets, partage de savoir faire, communautés d’innovateurs, management horizontal, etc.
Plusieurs entreprises envisagent ainsi de s’appuyer sur un dispositif de type Fab Lab pour explorer et tester de nouvelles formes d’innovation plus ouverte, plus agile, plus inattendue.
Dans le cadre de l’expédition ReFaire lancée par la Fing, le Groupe Seb et Renault ont saisi l’opportunité d’expérimenter l’ouverture de Fab Labs en leur sein. Dans quel but, de quelle manière, avec quels (premiers) résultats ? Cette synthèse conclusive de ce travail prolonge le témoignage de ceux qui ont lancé ces premiers espaces en fournissant un premier “guide” à ceux qui souhaiteraient explorer la possibilité de créer à leur tour un Fab Lab au service de leur entreprise.
Un Fab Lab en entreprise, comment faire ?
Si de nombreuses entreprises disposent de moyens de prototypage rapide, peu d’entre elles les ont encore mobilisés dans le cadre d’un dispositif ouvert et souple tel qu’un Fab Lab. On dispose donc de très peu de recul sur leur expérience. Cependant, de l’observation des différents Fab Labs ouverts dans le monde, ainsi que de l’échange entre les participants de l’expédition ReFaire, émergent à la fois une première typologie des Fab Labs en entreprise, et des conditions de réussite.
Trois modèles de Fab Labs d’entreprise
Une entreprise peut développer son propre Fab Lab, collaborer à un projet commun avec différents partenaires, ou même faire le choix de participer à un Fab Lab totalement ouvert.
Le Fab Lab “interne”
Un Fab Lab interne reprend la configuration, outils, pratiques et savoirs d’un Fab Lab classique tel que le définit le MIT, mais se destine en priorité à des collaborateurs de l’entreprise. D’autres participants – partenaires, chercheurs, clients… – peuvent y être conviés, mais dans des contextes et à des fins précises.
Ce choix facilite le contrôle de la circulation des idées et des projets. Il présente en revanche l’inconvénient de ne pas inviter des énergies et des idées venues d’ailleurs à s’y exprimer et à questionner les certitudes de l’entreprise. Le succès repose alors :
- Sur la capacité d’attirer des collaborateurs très divers (y compris tout en bas de l’échelle), d’organiser le croisement des métiers et des statuts et de donner une vraie chance aux projets de se développer – y compris, pourquoi pas, lorsqu’ils ne sont finalement pas retenus par l’entreprise elle-même (essaimage, publication…) ;- Sur la construction d’une “communauté” d’utilisateurs réguliers, qui peuvent considérer le Fab Lab comme un lieu d’expression, de respiration, d’échanges conviviaux et professionnels à la fois.
Le “Creative People Lab” de Renault Lomig Unger et Mickaël Desmoulins sont les deux porteurs de l’espace de créativité “Creative People Lab” ainsi que sa composante “Fab Lab” interne, en vidéo, ils reviennent sur les apports de cet espace pour Renault : 1ère partie, 2nde partie.
Le Fab Lab “coopératif”
Le Fab Lab “coopératif” est un Fab Lab semi-ouvert vers l’extérieur, souvent créé et exploité en commun par plusieurs partenaires : les entreprises d’une filière ou d’une zone industrielle, les acteurs (entreprises, enseignement, recherche…) d’un campus universitaire, etc.
Du point de vue de l’entreprise, un tel lieu doit favoriser la rencontre avec son écosystème, la collaboration avec la recherche, la conception collaborative (avec ses prestataires et sous-traitants par exemple), l’innovation ouverte (collaboration avec des startups ou des entreprises d’autres secteurs), voire le “prototypage ouvert”. Chacun des participants à cet espace porté par plusieurs acteurs mobilisant son propre écosystème, le Fab Lab coopératif peut produire des interactions riches et des résultats inattendus.
La collaboration du Groupe Seb avec le Master IDEA et la création du Fab Lab Karim Houni du Groupe SEB revient sur la collaboration entre le Master IDEA et leur contribution à la création d’un Fab Lab en son sein, en vidéo.
La collaboration avec des Fab Labs “externes”
Dans ce troisième cas, l’entreprise choisit de travailler avec des espaces existants à proximité de ses centres de R&D, de design ou de production, plutôt que de créer son propre Fab Lab.
Cette collaboration peut prendre deux formes distinctes :
- Un partenariat construit entre l’entreprise et le Fab Lab. L’objectif est de se frotter à d’autres formes de collaboration et d’innovation, de rencontrer la communauté des makers (les bricoleurs “pro-amateurs” de l’ère numérique), voire d’en faire partie. L’entreprise peut par exemple accompagner certains projets, apporter son expérience et le savoir faire de ses salariés, mettre à disposition certaines capacités techniques, etc. En retour, elle peut s’appuyer sur la communauté présente pour chercher la réponse à des questions difficiles, explorer avec elles certaines idées nouvelles, y détecter des talents et des projets…
- Il peut s’agir plus modestement d’offrir à certains employés de l’entreprise du temps pour développer leur projet, dans un lieu différent de l’entreprise et propice à l’expression de leurs capacités.
Des entreprises comme Ford et Airbus s’intéressent à ce type de partenariat.
__ Ford et le TechShop de Detroit : accélérer l’innovation de l’extérieur Sortes de Fab Labs commerciaux, les TechShops sont de grands espaces privés (environ 1500 m²) dont le principe fondateur est de rendre accessible et à bas coût un ensemble de machines, d’outils et d’équipements dédiés à la fabrication personnelle. Ils s’adressent aux inventeurs, aux bricoleurs, aux entrepreneurs, aux artistes, aux designers, etc. qui ne disposent pas d’ateliers de fabrication, de matériels, voire des compétences nécessaires pour réaliser leurs projets.
Le premier TechShop a été ouvert en 2006 à Menlo Park (Californie) et accueille plus de 500 membres qui règlent une adhésion mensuelle, bien qu’il existe également un forfait à journée. L’adhésion permet d’utiliser toutes sortes de machines ainsi que tout le petit matériel (oscilloscope, fer à souder, perceuse, etc.). Le TechShop est ouvert 7 jours sur 7 de, 9h à minuit. Il offre également divers services : du conseil pour réaliser ses projets, des cours d’utilisation des machines, ainsi que la réalisation de projets personnels par des professionnels.
A Detroit, capitale de l’industrie automobile Américaine, le constructeur Ford a cofinancé l’ouverture d’un Techshop, pour en faire bénéficier la communauté de makers très actives dans cette ville, mais également ses propres salariés. L’objectif est de permettre aux salariés de s’exprimer, de développer des pratiques innovantes et des projets parfois en rupture, que les modèles organisationnels des grandes entreprises ne savent pas détecter. Selon Ford, le nombre propositions innovantes issues du personnel aurait augmenté de 30% depuis le démarrage de cette initiative.

1 commentaire:

  1. Pourquoi seulement l'entreprise ?
    C'est lorsque les imprimantes 3D arriveront dans des ateliers de quartier qu'une mutation socio-politique s'engagera : http://lestroboscope.net/article/impression-tridimensionnelle/

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