mardi 29 avril 2014

Thierry Bardy " visite guidée du premier centre commercial 2.0"

Le 8 avril dernier, un nouveau centre commercial ouvrait ses portes en région parisienne. Son nom ? Qwartz. Sa particularité ? C'est le premier centre commercial 2.0. Aussi, les dispositifs connectés y sont à l'honneur. Cap sur Villeneuve-la-Garenne, pour la visite guidée.



 Des vitrines magazines pour dévoiler des looks proposées par des marques
Disposées en deux endroits du mall, ces vitrines sont réalisées par une spécialiste de l'aménagement des devantures des grands magasins. Une exposition intéressante pour la marque mais qui a un coût : environ 10 000 euros pour deux mois.

© Qwartz & co, un point de vente éphémère pour renouveler l'offre
Cet espace de 200 m2 est divisé en trois cellules et offre un espace de vente à des marques qui n'auraient pas les moyens de s'offrir une cellule en bail classique ou qui souhaitent juste une exposition durant un laps de temps défini, pendant les fêtes, par exemple. 

© Des aires de jeux qui offrent la part belle au digital
Comme celui proposant un mur d'écrans et de capteurs devant lesquels les plus jeunes peuvent évoluer, leurs corps se substituant aux manettes



S'asseoir à une table et travailler sur son ordinateur branché, donner le biberon à son bébé... Qwartz tient compte des moindres désirs des visiteurs et leur met à disposition des aires de repos adaptés à chacun. Une première dans un centre commercial.


© La première cité du e-commerce
Au sein du centre commercial, sont proposées huit bornes numériques louées à des enseignes absentes physiquement du centre, ou 100 % Internet comme Made.com. Le tout moyennant une commission sur les ventes.


© Le social wall pour événementialiser le centreQwartz présente dans son hall d'accueil un mur digital géant relayant en temps réel les actualités du centre mais aussi les posts des visiteurs et des fans Facebook.


© Un lustre en impression 3DSuivant le phénomène du crowdsourcing, Qwartz met à l'honneur la créativité de ses visiteurs en exposant cet objet monumental constitué d'objets 3D créés par les consommateurs. 


© Entre personal shopper et magic mirror...Un espace dédié au personal shopper où une spécialiste de la mode prodigue des conseils de style. Un magic mirror permet de faire des essais virtuels de looks.

mardi 22 avril 2014

Deloitte prédit 10 évolutions IT de rupture



Parmi les ruptures technologiques qui s'imposeront dans les dix-huit mois, Deloitte place aussi l'engagement omnicanal qui se crée entre une marque et ses clients.
L'étude « Tech Trends » de Deloitte identifie tous les ans 10 tendances technologiques qui transforment les modèles économiques. Cette année, elle voit le DSI se muter en capital risqueur, le crowdsourcing s'industrialiser et envisage les déclinaisons professionnelles des objets connectés.

Deloitte fait un point régulier sur les tendances technologiques qui montent en puissance et devraient avoir un impact sur les entreprises dans les douze à dix-huit mois. L'an dernier, le cabinet avait déjà prévenu que le DSI devrait accompagner les métiers vers l'ère post-numérique. Cette année, dans son rapport « Tech Trends 2014, Inspiring Disruption », il distingue cinq tendances de rupture et cinq accélérateurs qui doivent aider à mieux appréhender ces mutations. Les équipes de Deloitte France ont accompagné cette étude, présentée cette semaine à Paris, en présence de Mark White, CTO du groupe. Eric Delgove, associé responsable des activités Technology, souligne que cet observatoire s'appuie sur des exemples concrets identifiés chez les clients.

1 - Le DSI en capital risqueur

La 1ère tendance de rupture, très intéressante, donne au DSI un profil d'investisseur en capital risque. Le patrimoine IT de l'entreprise est considéré comme un capital qu'il doit gérer. « Le DSI va prendre des risques pour ajouter de la valeur à ce portefeuille et pour répondre à l'évolution des métiers », explique Eric Delgove en rappelant par ailleurs la pression sur les coûts subie par cette direction informatique. Aujourd'hui, les investissements stratégiques destinés à transformer le métier sont limités par les obligations liées à la maintenance de l'existant. La DSI va donc procéder à des investissements mesurés sur de nouvelles technologies en adoptant la démarche d'un capital risqueur. Tisser des réseaux de partenaires pour co-créer ou installer des accélérateurs de start-ups sont deux voies empruntées pour le réaliser. Dans ces domaines, Deloitte France cite d'une part l'exemple de Crédit Agricole et de sa plateforme ouverte d'apps bancaires CA Store et d'autre part les initiatives d'Orange et de Telefonica du côté des start-ups avec Orange Fab et Wayra.

2 - L'analyse cognitive au service des métiers

L'analyse cognitive est la 2ème tendance de rupture décrite par Deloitte. Elle consiste à chercher à s'inspirer du mode opératoire du cerveau humain pour faciliter le raisonnement. Au-delà de l'analytique classique, il s'agit d'apprendre à partir des expériences, par exemple pour améliorer le diagnostic médical. Parmi les exemples déjà mis en oeuvre, l'assurance maladie WellPoint fait des recommandations sur les traitements de patients qui permettent de réduire radicalement les délais de pré-approbation de leurs dossiers. « Cette tendance nous dit qu'il faudra enrichir les équipes informatiques de façon transverse », souligne Eric Delgove.

3 - Le crowdsourcing industrialisé

La 3ème tendance dégagée par Deloitte porte le crowdsourcing industrialisé, ce partage de connaissances collaboratif qui consiste à « faire appel à la foule »pour résoudre des problèmes fastidieux. « Je fais de la co-création avec des personnes que je ne connais pas, je partage du savoir », décrit Sébastien Ropartz, associé responsable Conseil chez Deloitte France en rappelant que cette démarche a commencé dans le secteur public avant de passer dans le secteur privé. Il cite en exemple de la ville de Plouarzel, l'une des premières à avoir participé à l'initiative Open Data. La commune bretonne a sollicité ses habitants (un peu plus de 3 000 personnes) pour dresser la dernière version de la carte communale sur le logiciel de cartographie libre OpenStreetMap. Autre exemple, cette fois dans la grande distribution, avec Quri qui collecte des informations sur les produits en magasin (prix, qualité, ruptures...) grâce aux utilisateurs et une app mobile. Ou encore General Electrics qui est parvenu à obtenir un algorithme de prédiction des horaires des vols aériens à la suite d'un concours sur sa plateforme Kaggle. Cette évolution vers le crowdsourcing nécessitera sans doute une ouverture des sytèmes, fait remarquer Deloitte.

4 - L'engagement omnicanal entre les clients et les marques
Si la 4ème tendance est moins technologique, elle doit néanmoins être considérée compte tenu de l'importance qu'elle prend. Il s'agit de l'expérience utilisateur transformée par la numérisation des usages. « C'est l'engagement entre le client et la société qui va lui vendre produits et services », dépeint Eric Delgove. Les données récupérées par le web marketing permettent aux entreprises de faire du push, mais il y a une saturation du côté du consommateur. « Toutefois, l'internaute est prêt à partager davantage de données moyennant un contrat, en échange de contenus pertinents et personnalisés, s'il n'est pas harcelé ». Le monde du CRM va être bouleversé, les clients s'attendant à une relation « sans couture » entre les différents canaux qu'ils utilisent. « L'omnicanal devient une exigence de l'utilisateur », souligne l'associé de Deloitte.

5 - Les objets connectés injectés dans les services
La 5ème tendance mise en évidence par le cabinet concerne les vêtements et accessoires connectés : montres, lunettes, bracelets capteurs du rythme cardiaque... « Aujourd'hui, ces objets passent du grand public vers le monde des services », note Eric Delgove. Il convient d'explorer les débouchés possibles pour les métiers. Outre l'utilisation de lunettes connectées (telles les Google Glass) dans l'industrie, par les opérateurs logistiques des entrepôts par exemple, il pointe surtout le secteur de la santé avec la surveillance de patients, permettant notamment de réduire les dépenses. D'un point de vue technique, ce suivi en temps réel aura un impact sur la gestion de la bande passante. « Mais nous sommes aussi dans la gestion de la vie d'autrui. Or, beaucoup de sociétés ont outsourcé une partie de l'infrastructure. Qui dès lors va accepter la responsabilité de monitorer la vie humaine », questionne-t-il

6 - S'attaquer à la dette technique

Le premier, déjà bien connu, est la prise en compte de la dette technique, c'est-à-dire du coût du code historique présent dans les systèmes d'information. Moins performant, il freine l'entreprise dans ses nouveaux développements. Cette dette technique est estimée à 2,62 euros par ligne de code. Pour avancer, il faut réduire ce passif, amorti comptablement et dont la non-qualité pèse sur l'organisation. C'est devenu de plus en plus prégnant parce que lorsque l'on s'attaque au fond des applications de back office pour réaliser certaines évolutions, notamment pour la mobilité, on part dans des cycles de développement auxquels on ne s'attendait pas du tout, souligne Deloitte France. « Si on ne prend pas la mesure de cette dette technique, on risque de louper le virage du digital et nous pensons que la DSI doit avoir ici un discours transparent », estime Sébastien Ropartz, associé, responsable Conseil. Il cite la NASA qui a fait le choix de réécrire 3,5 millions de lignes de code, plutôt que les déboguer, pour être en mesure de lancer plus vite une autre mission sur Mars.

7 - Prendre appui sur les réseaux sociaux

Exploiter les réseaux sociaux constitue un 2ème accélérateur, par exemple en s'appuyant sur des communautés existantes pour promouvoir un produit. Il ne s'agit plus seulement « d'écouter » ce que l'on dit de la marque sur ces médias, mais d'une démarche proactive qui conduira, par exemple, à transformer certains clients en ambassadeurs de la marque. C'est une notion déjà promue depuis un certain temps par les spécialistes du marketing. Cela peut passer par la création d'une communauté autour d'une thématique, comme l'enseigne de bricolage Castorama l'a fait avec les Troc'Heures qui permettent l'échange de services et conseils.

8 - Connecter les services clouds entre eux et au SI

L'orchestration des offres cloud est un 3ème accélérateur. Avec la multiplication des solutions SaaS (software as a service) se pose la question de la réintégration de l'information dans le SI. On aborde cette fois le domaine du middleware qui s'étend jusqu'aux problématiques de sécurisation des données. De nouveaux modes d'intégration se mettent en place, de cloud à cloud, du cloud au SI centralisé.

9 - Le in-memory comme levier d'optimisation des processus

Autre accélérateur, la révolution in-memory. « Nous voyons de plus en plus de clients s'intéresser à cette puissance de traitement et de plus en plus d'appétence à tester ces nouvelles technologies », souligne Eric Delgove, associé de Deloitte. Ils s'y intéressent par exemple pour la planification de la production. En France, les entreprises comprennent et testent la technologique sur leur système d'information décisionnel mais elles attendent un peu plus de maturité sur le produit pour le faire sur le transactionnel, par exemple sur la supply chain, remarque Deloitte France.

10 - Accélérer la mise en production avec DevOps

Enfin, le dernier accélérateur identifié par le cabinet pour favoriser l'adoption des technologies de rupture se rapporte aux méthodes de développement des équipes informatiques. Issue du mouvement Agile, la démarche DevOps permet la collaboration entre les développeurs, les équipes IT opérationnelles et le service qualité pour accélérer la mise à disposition d'environnements. Typiquement, elle s'adresse aux organisations qui doivent faire des adaptations dans leur code en ligne très rapidement, rappelle le cabinet. « Parfois jusqu'à 10 changements par jour dans le code », évoque Deloitte France.

La démarche DevOps fait travailler ensemble des équipes ayant a priori une vue antinomique, l'une garantissant la stabilité de l'application, l'autre misant sur l'innovation. Elle permet une mise en oeuvre rapide du nouveau code, rapidité imposée par l'évolution des environnements numérisés. Pour illustrer ce cas de figure, Deloitte cite le site web la Fnac.com qui doit réagir très vite pour constituer des offres de produits packagées en fonction du marché.

Projet Loon : les essais de Google s'approcheraient du LTE

Thierry Bardy - tags ; projet Loon , réseaux/infrastructures du futur, LTE, 5G, 4G,  

Dans le cadre de son projet Loon, Google conduit actuellement des tests dans le nord du Nevada. (agrandir l'image - Crédit : Martyn Williams / IDG News Service)  

Dans le cadre de son projet Loon, Google conduit actuellement des tests dans le nord du Nevada. (agrandir l'image - Crédit : Martyn Williams / IDG News Service)
Des demandes d'autorisation déposées par Google auprès de la FCC américaine, dont les détails doivent rester secrets, laissent penser que son projet Loon a franchi une étape vers la LTE. Ce projet prévoit le recours à des ballons de haute altitude pour désenclaver les zones mal desservies par Internet.

Google a conduit des tests dans le désert du Nevada, sans doute dans le cadre de son projet Loon qui prévoit d'utiliser des ballons pour relayer une connexion Internet dans des zones isolées. Il n'a pas souhaité faire de commentaires mais un responsable local a confirmé que ces tests étaient bien liés à ce projet et des documents administratifs mentionnent le lancement récent de plusieurs ballons.

L'initiative Loon a été présentée en juin 2013, Google expliquant alors qu'il expérimentait, avec des ballons flottant à 20 km au-dessus du sol, l'utilisation de liens radio dans une plage de fréquence non utilisée, autour de 2,4 GHz. Mais en septembre dernier, Cyrus Behroozi, l'ingénieur réseau du projet, a demandé à la FCC  (Commission fédérale des communications aux Etats-Unis) la permission de tester Loon sur une large zone dans le nord de l'Etat du Nevada, sur deux plages radio utilisées ensemble pour les services 4G LTE. Google ne dit pas exactement quelle technologie sans fil il prévoit d'utiliser, mais il donne une indication générale sur le signal, une classe qui inclut LTE, WiMax et d'autres systèmes de transmission de données point-à-point par micro-ondes. Cette précision, associée à l'utilisation des deux plages radio appariées, laisse penser qu'il s'agit probablement de tests LTE.

Obtenir l'autorisation des opérateurs haut débit sans fil

L'autorisation de la FCC est arrivée en novembre, donnant à Google la permission d'effectuer des tests pendant six mois à partir de deux plateformes radio : l'une au sol et l'autre à 20 kilomètres du sol, les deux se situant à 160 kilomètres environ autour de Carlin, une ville du Nevada de moins de 3 000 habitants.

Cette zone couvre une partie importante du nord de l'Etat et la permission a été accordée à Google à deux conditions. Premièrement, qu'il obtienne l'autorisation des opérateurs haut débit sans fil qui couvrent la région et deuxièmement, qu'il fasse en sorte que ses tests se déroulent à plus de 25 miles d'une station LTE située à Elko et opérée par AT&T, Verizon et T-Mobile.

Google a pu décider d'utiliser des plages attribuées pour échapper aux fortes interférences qui trouvent parfois sur la plage 2,4 GHz, mais si un service commercial Loon utilise la même bande de fréquences LTE, cela compliquerait sa mise en service parce que Google aurait besoin de l'autorisation des régulateurs dans de nombreux pays.

Des tests secrets pour des motifs concurrentiels


Dans la demande qu'il a formulée auprès de la FCC, Google a souhaité que les détails des tests qu'il comptait faire restent secrets pour des raisons de concurrence. « La technologie est en cours de développement et très sensible et par nature  confidentielle », a-t-il écrit à la FCC. « La communication de telles informations fournirait de précieux renseignements sur les innovations technologiques de Google et ses projets et stratégies potentiellement stratégiques ». Divulguer les essais, ajoute Google, mettrait en péril la valeur de la technologie » et permettrait à d'autres « d'utiliser les informations de Google pour développer des produits similaires dans les mêmes délais ».

Les ballons de Google volent à 20 kilomètres, deux fois plus haut d'un avion de ligne. Ils ne devraient donc pas poser de problème à l'aviation commerciale, sauf au moment de leur lancement et de leur descente, Google devant alors avertir les pilotes locaux des opérations qu'il effectue.

Selon la société Bravo Airspace, qui analyse les données aériennes, six avis de lancement en haute altitude pour des ballons  ont été émis dans la zone depuis le début de l'année. La plus récente remonte au 7 avril. Il décrit un lancement effectué depuis l'aéroport de Winnemucca, près de l'endroit où Google procède à ses essais. Un responsable local a confirmé que la société faisais des tests depuis cet aéroport, mais n'a pas souhaité en dire davantage, mentionnant un accord de confidentialité entre la ville et Google.

Les ventes digitales de Warner Music pèsent plus que ses ventes physiques


Thierry Bardy - tag: musique, Major.

Warner Music ventes digitales Xerfi 
L'exemple de la Major est symptomatique d'une industrie qui, après avoir critiqué Internet, y voit sa dernière bulle d'oxygène.
Le marché de l'industrie musicale est un marché extrêmement concentré, contrôlé à 75% par trois acteurs, Sony Music, Universal Music et Warner Music. Des majors qui ont vu leurs revenus en provenance des ventes physiques dégringoler d'année en année et qui ont réussi à endiguer cette érosion de leur chiffre d'affaires en concentrant leurs efforts sur une offre digitale en plein boom. Les contrats noués avec des pure players comme Deezer ou Spotify, qui reversent l'équivalent de 60% de leurs recettes à chacun des acteurs (au prorata de leur part de marché) ont fait vivre le tiroir-caisse. Ainsi 2013 a-t-il permis aux trois groupes de renouer avec la croissance de leur chiffre d'affaires, après trois exercices périlleux.
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A gauche, l'évolution du chiffre d'affaires des 3 majors. A droite, leus parts de marchés.  © Xerfi
Longtemps considéré comme l'ennemi à abattre, Internet a, sans aucun doute, constitué une véritable bulle d'oxygène pour ces majors, avec des ventes digitales qui n'ont cessé de croître au fil des années, pour dépasser les 4,3 milliards d'euros en 2012 (soit une part de marché de 35%).
Warner Music, qui pèse à peu près 15% du marché de la musique, a poussé la logique encore plus loin, multipliant les partenariats avec des acteurs tels que la plateforme Myxer (dont il alimente la communauté en clips vidéos et sonneries de téléphone), Qtrax (une plateforme gratuite de téléchargement de musique) ou MySpace. Warner Music a ainsi vu ses ventes digitales passer de 255 millions d'euros en 2006 à 776 millions d'euros en 2013, alors que dans le même temps ses ventes physiques chutaient de 177%, pour passer de 1,9 milliards d'euros à 700 millions. Warner Music gagne donc plus avec la vente digitale qu'avec la vente physique !
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Evolution de la répartition du chiffre d'affaires de Warner Music.  © Xerfi
Entre, d'une part, une offre par abonnement portée par des pure players comme Deezer, Spotify et bientôt Beats, et, d'autre part, un achat à l'acte initié par les iTunes, Amazon et consorts, on se rend compte que la situation diffère énormément selon les marchés. Ainsi l'Hexagone, la Suède ou la Corée du Sud donnent-ils la part belle à l'abonnement alors qu'aux Etats-Unis, en Allemagne ou au Royaume-Uni, le rapport de force est inversé.
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Téléchargement vs Streaming, par pays.  © Xerfi
Source
L'étude "Industries du film de et la musique. Analyse de marché – tendances à l'horizon 2019 – stratégies des acteurs" est publiée par Xerfi, éditeur indépendant d'études économiques sectorielles.

jeudi 17 avril 2014

Google,Amazon et Apple veulent une part du gateau du paiement de demain .

Thierry Bardy - tags : paiement , mobile paiement

Des acteurs comme Google, Amazon ou Facebook veulent profiter du développement du téléphone mobile pour s'imposer sur le marché des moyens de paiement. Une menace redoutable pour les banques.

Boll pour « Les Echos » 
A lui seul, l'acronyme résonne comme une mise en garde aux oreilles des banques : « Gafa », pour Google, Amazon, Facebook et Apple. Ces géants de l'Internet et de l'e-commerce veulent profiter du développement du téléphone mobile pour s'imposer sur le marché des moyens de paiement. Si peu sexy et rentable soit-il, ce métier apparaît en effet dans leur écosystème comme le pendant d'autres services à forte valeur ajoutée, liés aux nouvelles fonctionnalités offertes par les smartphones. Ceux-ci modifient les usages en permettant de personnaliser les offres commerciales, d'éviter les files d'attente ou encore d'identifier par géolocalisation un client potentiel dans une zone de chalandise.
Jusqu'ici les banques ont affiché un certain flegme. N'ont-elles pas déjà eu à affronter d'autres offensives sur ce marché coeur, qu'il s'agisse des systèmes de cartes privatives American Express ou Diners au siècle dernier, ou plus récemment des cartes affinitaires d'établissement de paiement comme Aqoba ? Des intrusions cantonnées à des marchés de niche. Mais la donne a changé : les barrières à l'entrée du marché des moyens de paiement, qui pouvaient refroidir des acteurs plus petits, n'arrêteront pas ces géants des temps modernes. Ils disposent en effet tous d'une capitalisation boursière de nature à leur donner les moyens financiers de leurs ambitions.
L'avalanche de contraintes réglementaires pesant sur le marché des moyens de paiement est sans doute un frein plus sérieux. C'est la raison pour laquelle les banques conservent aujourd'hui le statut de tiers de confiance par excellence. Toutefois, la dernière faille de sécurité, baptisée « Heartbleed », mise au jour au sein du logiciel OpenSSL, a révélé qu'elles n'étaient pas non plus à l'abri des hackers. Ce semblant de banalisation est une mauvaise nouvelle alors même que la directive européenne en préparation sur les services de paiement (DSP2) promet de faire la part belle aux acteurs non bancaires. «  La possibilité qui serait donnée aux prestataires de services de paiement tiers d'accéder au compte bancaire de leurs clients pourrait constituer un véritable cheval de Troie pour les banques », constate Pascal Burg, directeur du bureau français d'Edgar, Dunn & Company. « Plus généralement, le régulateur européen donne de plus en plus de pouvoir aux marchands. »
Dans ce contexte, la menace devient d'autant plus précise que les Gafa lorgnent désormais le commerce physique. Jusqu'ici, leur base de clientèle avait beau être bien supérieure à celle des banques - Facebook à lui seul dispose de 945 millions d'utilisateurs sur mobile dans le monde -, elle ne leur donnait accès qu'aux données liées aux transactions en ligne, qui ne représentent pas plus de 10 % du commerce. Leur connaissance client ne pouvait donc être que très parcellaire. Mais Amazon a par exemple annoncé son intention d'installer des tablettes Kindle chez les commerçants pour remplacer leurs caisses enregistreuses. Comme sur Internet, les données de paiement captées pourront enrichir les algorithmes utilisés pour approfondir la connaissance de chaque client et lui faire des offres personnalisées.
Et pourquoi pas aussi dans les services bancaires ? L'exemple d'Alibaba, en Chine, a de quoi faire réfléchir sur la capacité de ces acteurs à « désintermédier » les banques. Fort de ses relations avec des dizaines de milliers de commerçants, le géant chinois du commerce en ligne a proposé des prêts aux PME, puis de l'épargne. Il a ainsi drainé en quelques mois 50 milliards de dollars, moyennant des taux de rémunération très attractifs. Et il promet de lancer prochainement une carte de crédit. Certes, le phénomène «  n'est pas transposable dans des pays matures comme les nôtres, mais cela montre bien que, en habituant le client à gérer ses flux d'argent, on peut l'amener vers d'autres services bancaires », souligne Olivier Sampieri, associé au BCG.
Le fait qu'aucun standard de paiement avec un mobile ne se soit encore imposé garantit un sursis aux banques mais il n'y a plus de temps à perdre pour organiser la riposte. Si PayPal n'a pas percé aux Pays-Bas, c'est parce que les banques néerlandaises se sont dotées d'une solution commune de paiement en ligne baptisée « Ideal », par laquelle passent plus de 84 % des achats en ligne. C'est ce même type d'alliance entre banques, au sein du GIE Cartes bancaires, qui a fait le succès de la CB en France. Mais, aujourd'hui, «  les établissements bancaires balancent entre l'idée de s'allier pour s'assurer que ce marché potentiel ne leur échappe pas et la tentation de faire cavalier seul car ils voient dans le paiement mobile un axe fort de différenciation », résume Olivier Sampieri.
L'arrivée de Fivory, le dernier-né des moyens de paiement bancaires, ouvre une voie intermédiaire. Plutôt que de le déployer lui-même, comme ses concurrents, le Crédit Mutuel-CIC fait le choix d'en confier la distribution aux commerçants. Ces ennemis d'hier, qui se sont tant battus contre les banques pour baisser les commissions liées aux paiements par carte, deviennent ainsi des alliés. «  Comme dans le monde du logiciel, les paiements vont voir se développer des logiques de "coopétition" : les banques vont s'allier avec des partenaires dans certains domaines ou géographies et être concurrentes dans d'autres », anticipe Pascal Burg. Cette logique nouvelle résoudra-t-elle pour autant la question du standard de place capable de bouter les géants du Net hors du marché des paiements ? Difficile à dire, mais si coûteux ce pari puisse-t-il se révéler pour les banques, elles semblent prêtes à le relever.


Apple serait en train de bâtir son propre système de paiement




Apple paiement
Apple stocke déjà 400 millions de numéros de cartes bancaires, développe via iBeacon un réseau de marketing mobile et pourrait ouvrir Touch ID à des tiers.
 Prochaine étape : l'infrastructure ?
Apple serait en train de bâtir son propre système de paiement. Cette assertion provient d'un rapport de Morgan Stanley intitulé "Mobile Payments - Blue Paper Revisit, EMV in Focus", que s'est procuré VentureBeat. Et effectivement, un tel projet apparaît comme une étape très logique dans la stratégie de la firme. Rien qu'avec iTunes, Apple possède les numéros de cartes bancaires de 400 millions de consommateurs. Ce qui lui confère déjà un sérieux avantage pour se positionner sur le domaine du paiement.
Tim Cook avait déjà annoncé qu'il comptait lancer de nouvelles catégories de produits et services en 2014. Lors de la présentation de ses derniers résultats financiers, le PDG d'Apple a précisément abordé ce sujet : "Globalement, nous constatons combien les gens aiment pouvoir acheter du contenu - qu'il s'agisse de musique, de films ou de livres - depuis leur iPhone, en utilisant la fonctionnalité Touch ID [qui, sur l'iPhone 5S, scanne l'empreinte digitale pour servir de code d'accès ou valider un achat sur l'App Store, iTunes et iBooks, ndlr]. Elle est incroyablement simple, facile et élégante. Et ouvre très clairement la voie à de nombreuses opportunités. Le domaine des paiements mobiles est l'un de ceux qui nous intrigue et que nous avions en tête en créant Touch ID."'
Tim Cook ajoutait qu'au vu des caractéristiques démographiques des clients d'Apple et du volume des ventes réalisées via des terminaux iOS, bien supérieur à la concurrence, ce projet ouvrait la voie à des opportunités bien plus larges. Par exemple, s'il est pour l'instant possible d'acheter du contenu sur iTunes et l'AppStore en utilisant Touch ID, cette technologie n'est pas encore disponible pour les applications tierces. On imagine bien l'ampleur que prendrait cet outil s'il était mis à la disposition de tous les acteurs réalisant des ventes via des terminaux sous iOS.
Ceci nécessiterait néanmoins qu'Apple mette en place un service client spécifique pour accompagner clients et marchands lors des transactions et, bien sûr, pour traiter les réclamations. A moins bien sûr que la firme n'externalise cette fonction.

Apple voudra-t-il bâtir sa propre infrastructure de paiement ?


Reste la question de l'infrastructure de paiement elle-même. Apple voudra-t-il construire la sienne en propre, pour pouvoir contourner les réseaux existants de type Visa et Mastercard ? Les investissements à y consacrer seraient bien plus conséquents que ceux alloués au déploiement de call centers. C'est toutefois faisable, comme l'a prouvé Discover Financial Services en montant le sien avec succès en 1986. Aujourd'hui, Discover émet des cartes de paiement, opère une banque en ligne et accorde des prêts immobiliers et étudiants. Sauf que la situation n'est plus la même aujourd'hui.
Morgan Stanley relève d'ailleurs une autre difficulté. Apple est en train de déployer toute une infrastructure de marketing mobile dédiée à la distribution, basée sur la fonctionnalité iBeacon des dernières versions d'iPhone. Aux Etats-Unis, nombre de magasins et de chaînes sont en train d'installer des émetteurs bluetooth à basse énergie afin de pouvoir pousser une publicité ou une offre sur l'iPhone du consommateur qui passe la porte ou s'arrête devant tel ou tel rayonnage. Le jour où les boutiques permettront aussi de régler ses achats - et de profiter de ces offres - avec son iPhone, Apple se retrouvera de fait partie prenante du processus de paiement en boutique.
Apple a déjà mis un grand pied dans la porte
Naturellement, l'initiative iBeacon renforce également la probabilité des grands projets qu'on prête à Apple en matière de paiement. A une exception près. Ce réseau de beacons sera bien sûr essentiel à la qualité d'un système de paiement mobile simple et facile à utiliser (d'autant qu'il s'accompagnera de nombreuses applications). Mais Apple tient généralement  à ce que l'expérience client soit aussi irréprochable que possible dès le lancement de ses nouveaux produits et services. Morgan Stanley conclut donc : "Nous pensons qu'Apple ne lancera pas un système de paiement mobile à moins que l'infrastructure qui le soutiendra ne soit prête".
Ce qui n'empêche pas la convergence de nombreux signaux . Selon les analystes de KGI Securities, Apple pourrait intégrer le NFC dans l'iPhone 6 et dans l'iWatch qui seront lancés cette année. La presse a également rapporté l'intérêt d'Apple pour une acquisition de Square, qui permet à tout un chacun d'accepter les paiements par carte bancaire sur iPhone ou iPad. Autant dire qu'Apple s'apprête manifestement à fondre sur le secteur du paiement, où il a déjà mis un grand pied dans la porte.

mercredi 16 avril 2014

Le magasin est et restera ...

A l’heure de l’explosion du e-commerce, plus que jamais l’avenir du commerce reste lié au point de contact physique que constitue le magasin. Les acteurs du web en sont pleinement conscients comme en témoignent les récentes initiatives prises par exemple par Google avec la rumeur d’ouverture de son premier point de vente à New York, Rue du Commerce avec l’implantation de ses bornes « Ma boutique express » dans les magasins Relay ou encore Amazon avec le lancement d’« Amazon Fresh » en Europe dès la rentrée 2014. Si les formats choisis sont différents, ils illustrent parfaitement l’envie, voire la nécessité, de trouver un moyen d’établir une relation, un lien direct avec les consommateurs et ce, pour leur faire vivre une expérience différente d’Internet.Ce mouvement touche aussi les enseignes « traditionnelles » préfigurant l’avènement de magasins « lieux de vie ».

Le salon Euroshop, couvert par les experts Techno de l’Echangeur by LaSer en février dernier, permet de dégager les axes de ces nouveaux « temples » de la consommation. Digital, vitrine, éphémère, virtuel ou 5 étoiles ; quelle que soit leur forme, l’expérience client sera  au cœur. Les magasins proposeront  ainsi des expériences différentes, uniques, enrichissantes. L’enseigne allemande Globetrotter reste à ce jour une réussite exemplaire de magasin 5 étoiles ; le client testant avant achat ses activités outdoor : bassin pour canoës, chambre froide ou mur de pluie pour tester la performance des vêtements, …Curiosité, apprentissage, découverte ou surprise seront donc les maîtres mots de ces points de vente. Ils sont aussi ceux qui résument le mieux une des 7 aspirations qui sous-tendent la consommation des européens : Life Booster.
Axa, Gémo, Helly Hansen, Delta Airlines ou Kenzo avec son pop up store digital « No Fish No Nothing“, les exemples ne manquent pas. Ainsi, Plus de la moitié des pratiques innovantes lancées cette dernière année surfent sur cette tendance souvent en la combinant avec l’aspiration Speed Organiser (le consommateur cherche des solutions pour lui simplifier la vie).  Moins emblématique que l’ouverture de l’agence Virgin Money à Londres, la rénovation de l’agence Crédit Agricole Rennes La Monnaie en est un bon exemple en France. Le bracelet MagicBands de Disney ouvre les portes du parc d’attraction d’Orlando.
Les 7 aspirations des consommateurs européens offrent des clés de lectures de leurs attentes et permettent de penser les futurs services de demain. Charge aux architectes et designers de concevoir ensuite les points de vente adaptés …
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mardi 15 avril 2014

15 insights des consommateurs d'aujourd'hui et de demain selon Havas

Havas Worldwide a méné une étude sur les tendances de consommation auprès de plus de 10 000 personnes dans plus de 31 pays dont la France. Tour d’horizon des grands enseignements du rapport.

Le physique pénètre le digital
Alors que le chiffre d’affaires de l’e-commerce a dépassé les 1200 Milliards de dollars en 2012, une majorité des personnes interrogées déclarent qu’Internet est devenu la première source de décision dans les achats offline ou online « impliquants » tels que les voitures ou les biens d’équipement.
Parallèlement 58% des consommateurs indiquent effectuer des recherches et essayer un produit en magasin physiques avant d’acheter le produit en ligne. Les enseignes qui n’ont pas de fortes présences en lignes risquent ainsi de devenir de simples showrooms pour leurs concurrents.
Le Showrooming devient mainstream
43% des personnes interrogées admettent utiliser un Smartphones en magasin pour trouver de meilleures offres et des discounts sur Smartphones, et 34% se déclarent à l’aise avec l’achat sur Smartphone, des chiffres qui s’élèvent à 59% et 48% sur le segment plus avancé des Prosumers (le segment avancé des consommateurs leaders d’opinions, défini à partir d’une méthodologie propriétaire d’Havas-Euro RSCG).
Pour 38 % des Prosumers, et 25% des personnes interrogées le mobile est déjà devenu le principal terminal d’achat en ligne précise l’étude.
L’Hyperchoix et la valeur des recommandations
Une part croissant des consommateurs soit 48% des personnes interrogées et 50% des Prosumers se déclarent déroutés par l’abondance d’information et de choix en ligne, cette proportion s’élève même à 52% sur la population des Millennials.
Une pratique qui met au centre du processus de décision les recommandation d’achats d’amis pour 58% des consommateurs et 73% des prosumers.
Un nouveau mode de consommation renforcé par les pratiques de partages ainsi 52% des consommateurs interrogés et 74% des prosumers indiquent partager en ligne des informations sur des produits et des marques.
Ils sont également 38% ( et 51% des Prosumers) à déclarer que les médias sociaux les ont fait changer d’avis l’année dernière sur un produit ou un service.
Le lien social avec les marques
58% des consommateurs se déclarent connectés avec certaines marques en ligne (77% des Prosumers) et 4 personnes sur 10 indiquent être engagées avec une ou plusieurs marques sur les médias sociaux (62% des prosumers).
Parallèlement 47% des Millennials et 52% des prosumers se déclarent plus enclin à acheter auprès d’une marque active sur les réseaux sociaux.
La mise en place de conversations reste toutefois un art délicat. 40% des consommateurs trouvent ainsi que les sites de médias sociaux trop intrusifs. Sur ce sujet précis indique l’étude, la qualité de réponse et l’utilité d’une marque et des informations mise en ligne font la différence.
48% des consommateurs, 59% des prosumers et 54% des millennials se déclarent indisposés s’ils n’obtiennent pas une réponse rapide des marques sur Facebook.
L’émergence de Pinterest
L’étude souligne par ailleurs l’émergence de Pinterest : 31% des consommateurs (et 44% des prosumers et 39% des Millennials se déclarent influencés par Pinterest.


Selon l’étude, les comportement digitaux vont s’accélérer et se complexifier. Les sociétés agiles seront celles qui décrypteront le comportement physique et digital des consommateurs et exécuteront le plus rapidement sur leurs insights, 68% des consommateurs se demandent en effet si ils ont trouvé le meilleur prix avant de procéder à un achat.
Cependant, les bas prix ne sont pas une garantie d’achats satisfaisants souligne l’étude. Il incombe aussi au marques de garantir et préserver la qualité du produit vendu, un segment sur lequel se distingue Ebay et Amazon Marketplace grâce à la ré-assurance fournie à la fois sur la garantie du produit d’origine et par les revues de consommateurs.
4 implications pour les marques


Développer un « In Store Shopping Intelligent » :
Première priorité, se doter d’analytics mobile et de systèmes intra-magasins afin d’engager les clients pour éviter le comportement de showrooming (coupons promotionnels, matching de prix, démonstration interactives de produits).
Combiner Commerce et communauté :
Faciliter des expériences marquantes d’achat en ligne combinant deals rapides et interaction sociale et impliquantes auprès des consommateurs (à l’exemple de Woot).
Le mobile premier écran
Les sociétés doivent adopter des pratiques mobile first incluant les caractéristique propres de la mobilité et des terminaux : la location, l’expérience mais aussi les horaires d’achats.
La valeur d’échange sociale
Les marques doivent à la fois maintenir une identité de marque active sur les médias sociaux. Etre efficace dans les réponses et les interactions plutôt que dans le push « unilatéral de contenu ». Cela ne signifie pas une « Omniprésence» mais un choix efficace des canaux sociaux d’excellence.
Une expérience personnalisée de Shopping pour tous
Le consommateur qui laisse de facto une foule d’informations personnelles en ligne s’attend à une meilleure expérience personnalisée de shopping. Les marques doivent renforcer leurs connaissances intime de chaque client et la valeur individuelle de la proposition délivrée (offre personnalisée, recommandations d’amis, suggestions personnalisées de cadeaux) tout au long du parcours d’achat.
L’impératif de la vitesse
Le consommateur s’est habitué aux réponses et livraisons rapides. Amazon et Walmart travaillent activement à mailler des centres de logistiques permettant des livraisons sans cesse plus rapides. La rapidité est la nouvelle frontière de l’e-commerce.
4 tendances pour 2025


La fin du cash ?
Les portefeuilles digitaux deviennent mainstream dans les pays émergents et en Afrique. Les progrès de la biométrique permettront aux consommateurs de payer avec leurs terminaux mais aussi aux marques de mieux communiquer avec leurs consommateurs. L’avenir en magasin en 2025 : le produit et l’offre proposée sera déjà disponibles pour chaque consommateur sur son terminal : plus de queues, plus de caisses, plus de cartes.
Le monde est ton ordinateur
Grâce au progrès de la biométrique, Le nombre de surface informatisées (tables de restaurant, voitures, réfrigérateurs) vont se multiplier. Les transactions digitales constitueront des gestes quotidiens.
Digital Shopping 2.0 :
Le digital envahira le physique et inversement. Les murs et vitrines de shopping (assortis de livraison rapides) vont se multiplier sur les façades des magasins. A la clef un espace libéré et un stockage plus réduit au sein des magasins.
La curation personnalisée
Alors que les processus d’achats se complexifient, chaque consommateur utilisera un « curateur personnalisé» une base de données de préférences et de besoins référençant et mettant à jour ses caractéristiques d’achats personnels (places dans une voiture, nombre d’enfants, préférences en termes de mode, de divertissement etc..)
La grande compétition des Apps
Aujourd’hui 80% des achats de M-commerce passent par les Apps. L’installation et la loyauté d’usage seront des enjeux clefs pour les marques, les enseignes et les distributeurs. Les marques agiles devront sans cesse mettre à jour leurs Applications et donner aux clients des raisons pour rester fidèles.

vendredi 4 avril 2014

« Le patient numérique personnalisé : images, médecine, informatique »

Thierry Bardy - tags ; Médecine personnalisée , Bionique ....

L'image représente une tête composée de multiples images médicales. © Inria - Asclepios
Nicholas Ayache donnera sa leçon inaugurale au Collège de France le jeudi 10 avril 2014 à 18h. Le cours, portant sur l'imagerie médicale computationnelle, s'intitule « Le patient numérique personnalisé : images, médecine, informatique ».
Nicholas Ayache est le nouveau titulaire de la chaire « Informatique et sciences numériques » au Collège de France. Ce cours s’intitule « Le patient numérique personnalisé : images, médecine, informatique ». A cette occasion, il présentera certaines des recherches les plus avancées en imagerie médicale computationnelle.
Ce jeune champ de recherche, à la croisée de l'informatique, des sciences numériques et de la médecine, a pour objectif de concevoir et développer des logiciels de traitement informatique des images médicales pour assister le médecin dans sa pratique clinique. Ces logiciels visent notamment à enrichir le diagnostic en extrayant, à partir d’images médicales, des informations objectives et cliniquement utiles. Ils visent également à assister la pratique thérapeutique avec des algorithmes de planification et de simulation appliqués à un modèle numérique du patient.

L’essor des images médicales

Divergence du flux de déformation dans l’évolution de la maladie d’Alzheimer: la couleur représente les régions changeant de volume. - © Inria - Asclepios

Les images médicales sont aujourd’hui omniprésentes dans la pratique médicale courante et hospitalière. Outre les radiographies, quatre grandes modalités d’imagerie sont couramment utilisées : le scanner, l’IRM, l’échographie, ou la scintigraphie1. Les images produites par ces quatre modalités sont volumiques : elles fournissent en chaque point du corps humain des informations mesurées dans un petit élément de volume appelé voxel, l’extension volumique du pixel.
Il existe d’autres modalités d’imagerie du corps humain, et de nouvelles techniques émergent régulièrement. Citons par exemple l’élastographie2 qui permet de mesurer l’élasticité des tissus à partir d’IRM ou d’ultrasons, et l’endomicroscopie qui permet de visualiser l’architecture microscopique des cellules à l’extrémité de fibres optiques.
La plupart des images médicales sont très volumineuses. L’image anatomique d’un organe, voire du corps entier peut contenir entre quelques millions et plusieurs centaines de millions de voxels, stockés dans d’immenses matrices 3-D de nombres. La quantité d’information augmente rapidement lorsque plusieurs images sont acquises sur un même patient pour exploiter la complémentarité des différentes modalités, ou pour suivre une évolution temporelle ; il s’agit alors d’images 4-D  avec trois  dimensions spatiales et une dimension temporelle.
Comme si ce déluge d’images ne suffisait pas, de grandes bases de données d’images deviennent progressivement accessibles sur la Toile d’Internet. Ces images sont souvent accompagnées de métadonnées sur l’histoire du patient et sur sa pathologie.

Le rôle de l’informatique et des sciences numériques

Maillage de calcul des 4 cavités cardiaques pour la simulation électromécanique du coeur. - © Inria - Asclepios
Face à toutes ces images et à leur complexité, le médecin ne peut souvent extraire visuellement que des informations lacunaires et qualitatives. Les images volumiques ne sont souvent visualisées que sous la forme de coupes 2-D. Il est alors quasiment impossible de quantifier précisément le volume d’une tumeur, de détecter une anomalie isolée dans un organe entier et suivre son évolution subtile entre deux examens, ou de quantifier dans une série temporelle d’images le mouvement d’un organe dynamique comme le cœur. Il est encore plus difficile de planifier une intervention délicate sans l’aide de l’ordinateur.
L’informatique et les sciences numériques jouent alors un rôle crucial pour exploiter de façon rigoureuse et optimale cette surabondance d’information. Elles sont essentielles pour l’analyse des images reconstruites dont le but est d’extraire de façon objective l’information cliniquement pertinente et de la présenter dans un cadre unifié et intuitif au médecin. Elles offrent également la possibilité de construire un modèle numérique du patient pour la simulation : simulation de l’évolution d’une pathologie ou de l’effet d’une thérapie par exemple, ou simulation de gestes médicaux ou chirurgicaux pour l’entrainement du praticien.

Orientations des fibres cardiaques mesurées in vivo par IRM de diffusion. - © Inria - Asclepios

Analyse et simulation informatiques des images médicales reposent sur des algorithmes qui doivent prendre en compte la spécificité de l’anatomie et de la physiologie humaines à l’aide de modèles mathématiques, biologiques, physiques ou chimiques, adaptés à la résolution des images. Ces modèles du corps humain dépendent eux-mêmes de paramètres permettant de modifier la forme et la fonction des organes simulés. Utilisés avec un jeu de paramètres standard, les modèles sont génériques : ils décrivent et simulent la forme et la fonction moyennes des organes dans une population. Mais avec les images médicales et l’ensemble des données disponibles sur un patient spécifique, les paramètres d’un modèle générique peuvent être ajustés grâce à des algorithmes pour reproduire plus précisément la forme et la fonction des organes de cet individu. On dispose alors d’un modèle personnalisé.


Patient numérique personnalisé et médecine computationnelle

Tractographie dans des images IRM de diffusion pour révéler la
connectivité du cerveau. - © Inria - Asclepios
Le patient numérique3 personnalisé n’est autre que cet ensemble de données numériques et d’algorithmes permettant de reproduire à diverses échelles la forme et la fonction dynamique des principaux tissus et organes d’un patient donné. C’est aussi le cadre unifié qui permet d’intégrer les informations provenant des images anatomiques et fonctionnelles du patient, ainsi que les informations qui décrivent l’histoire singulière du patient et de sa maladie.
Les modèles numériques et personnalisés du patient sont destinés à assister le médecin dans sa pratique médicale : assister le diagnostic en quantifiant l’information présente dans les images ; assister le pronostic en simulant l’évolution d’une pathologie ; assister la thérapie en planifiant, simulant et contrôlant une intervention. Voilà ce qui préfigure la médecine computationnelle de demain, une composante informatique de la médecine qui n’a pas vocation à se substituer au médecin, mais qui est destinée à lui fournir des outils numériques pour l’assister dans l’exercice de sa pratique médicale au service du patient.


Des images médicales au patient numérique

Variabilité des sillons corticaux mesurée sur 98 cerveaux sains, les zones rouges étant les zones de plus forte variabilité. - © Inria - Asclepios
Dans sa leçon inaugurale, intitulée « des images médicales au patient numérique », Nicholas Ayache choisi quatre exemples qui illustrent une certaine progression des algorithmes et des modèles mis en œuvre pour exploiter les images médicales. Les deux premiers exemples, morphométrie et endomicroscopie computationnelles, relèvent du domaine de l’anatomie computationnelle. Les algorithmes utilisés s’appuient sur des modèles géométriques, statistiques et sémantiques du corps humain. Les deux exemples suivants, oncologie et cardiologie computationnelles, relèvent de la physiologie computationnelle. Leurs algorithmes s’appuient en plus sur des modèles biologiques, physiques ou chimiques du corps humain. 


Conclusion

Maillage du foie pour la simulation de chirurgie laparoscopique. - © Inria - Asclepios
L’imagerie médicale computationnelle, à la croisée de l’informatique et de l’imagerie médicale, fournit de nouveaux outils numériques au service du médecin et du patient, dans le cadre plus large de la médecine computationnelle.
Les progrès actuels dans ces domaines permettent d’entrevoir comment l’informatique et les sciences numériques peuvent accompagner le passage d’une médecine normalisée et réactive à une médecine plus personnalisée, préventive et prédictive4. Ils reposent en grande partie sur des avancées algorithmiques en traitement d’images et dans la modélisation numérique de l’anatomie et de la physiologie du corps humain.

Les cours à venir, ainsi que les séminaires et le colloque de clôture approfondiront les fondements algorithmiques, mathématiques et biophysiques de ce domaine de recherche en plein essor, tout en illustrant son caractère pluridisciplinaire et ses avancées les plus récentes. On y retrouvera des scientifiques et des médecins de spécialités variées, au chevet du patient numérique.

mercredi 2 avril 2014

1/2 Le magasin physique va-t-il disparaître face à l’essor de nouvelles formes de commerce ?

Thierry Bardy - tags ; commerce , e-commerce , Showrooming, ROPO

Les annonces de fermetures de magasins emblématiques – le magasin Virgin à Paris, par exemple – et les statistiques prospectives pessimistes qui se multiplient – la disparition de 4 magasins sur 10 en Grande-Bretagne d’ici 2016 suscitent les craintes chez les acteurs du secteur.
Le commerce électronique (e-commerce) et le commerce mobile (m-commerce) constituent les principales ruptures dans le paysage du commerce de détail, auxquels s’est ajouté il y a peu de temps le commerce social, qui désigne l’activité de vente réalisée directement à travers les réseaux sociaux numériques.
La dynamique du magasin physique ne peut s’appréhender qu’au regard de l’évolution récente de ces différentes formes de commerce.
Si le commerce social est marginal, l’e-commerce et le m-commerce connaissent une forte croissance.
Passé les désillusions de la bulle Internet du début des années 2000, l’e-commerce atteint aujourd’hui des volumes significatifs et enregistrait des taux de croissance de 12,9 % aux États-Unis et de 18 % en France en 2012. Son poids futur dans le commerce de détail est estimé de 15 % à 40 % en France à l’horizon 2020 et à 9 % aux États-Unis en 2016.
En ce qui concerne le m-commerce, le téléphone intelligent (smartphone) en a permis une adoption très rapide, avec des taux de croissance de 129 % aux États-Unis (8 milliards de dollars) et de 152 % en France (4,4 milliards d’euros) en 2012.
Son poids est encore infime dans le commerce de détail, mais il devrait quintupler aussi bien en Europe qu’aux États-Unis à moyen terme.
L’application Flow Powered d’Amazon ou la concurrence directe en rayons
Cette application permet aux consommateurs d’obtenir toutes les informations sur un produit en pointant leur téléphone intelligent vers celui-ci, grâce à la réalité augmentée. Une fois l’objet reconnu, l’application affiche son prix, sa disponibilité, les critiques en ligne et des contenus multimédias provenant d’Amazon.com pour inciter à acheter en ligne.
Si l’e-commerce et le m-commerce progressent fortement, le taux de transformation, c’est-à-dire lorsqu’une visite se transforme en achat y est cependant beaucoup moins élevé que dans les magasins physiques: il reste inférieur à 2,5 % en moyenne pour l’e-commerce, tandis qu’il atteint 20 % en moyenne dans les magasins physiques.
De nombreux consommateurs restent très attachés à l’expérience réelle vécue, ce qui conduit des distributeurs virtuels à créer des boutiques traditionnelles pour tangibiliser leur offre.
Les magasins physiques des distributeurs virtuels
Les distributeurs en ligne – tels Amazon aux États-Unis, Cdiscount ou Materiel.net en France – multiplient l’ouverture de boutiques physiques. Ils sont placés devant la nécessité d’enrichir leur positionnement et recherchent pour cela une proximité réelle avec leurs clients. Ainsi, le magasin-concept éphémère d’eBay à Berlin en décembre 2012 visait à indiquer aux consommateurs allemands que le site n’est plus seulement un lieu d’enchères, tandis les Chrome Zones de Google en Grande-Bretagne permettent aux consommateurs de tester les Chromebooks.
Le spectre de la mort du magasin physique peut être raisonnablement écarté : il reste le premier lieu de réalisation des achats. Les défis sont cependant considérables et exigent des changements profonds pour que des difficultés majeures soient évitées.

Le consommateur, potentiellement toujours connecté à un téléphone intelligent, à une tablette numérique ou à un ordinateur, peut aujourd’hui acheter n’importe quel type de produit, n’importe où et à n’importe quel moment. Fabricants et responsables d’enseignes doivent donc savoir ce qu’un consommateur est susceptible de vouloir trouver dans un magasin physique afin de déterminer ce qu’il est intéressant d’y proposer. Une réflexion s’impose pour reconceptualiser le magasin physique : le secteur de la distribution est ainsi en plein questionnement, à la recherche de nouvelles voies de développement. Comment des magasins physiques peuvent-il contribuer, en articulation avec les autres points de contact, à enrichir l’expérience de magasinage ? Quelles peuvent y être les dimensions de la valeur de l’expérience de magasinage ?
5
Afin d’offrir un cadre de réflexion aux responsables d’enseignes et de marques, cet article dégage un panorama de cinq voies d’avenir significatives : le magasin physique peut être pensé …
éphémère,
tiers-lieu,
vitrine,
digitalisé ou virtuel.
Encadré 1. À propos de l’étude
Cette étude constitue un travail de synthèse nourri par quatre recherches menées sur les aspects suivants : les hypermarchés et l’introduction des nouvelles technologies en magasin, afin d’explorer, à partir du discours de consommateurs, les freins et les motivations à l’adoption des nouvelles technologies en magasin ; les magasins éphémères, dans le but d’analyser les caractéristiques de ce format et les motivations de son choix, dans un contexte international ; les magasins tiers-lieux, afin de comprendre dans quelle mesure ce concept appliqué au magasin revêt un sens pour les distributeurs et les consommateurs et peut constituer une voie d’avenir du magasin physique ; enfin, les applications mobiles, afin d’explorer les usages des applications mobiles et ce qui en fait la valeur aux yeux des consommateurs.
Tout d’abord, l’article examine les défis que le magasin physique doit relever et les atouts qu’il peut valoriser. Puis, les cinq voies d’avenir de ce format sont analysées. Enfin, des recommandations pour repenser le magasin physique sont formulées.
Des magasins physiques voués à changer
Si le magasin physique a historiquement été pensé seul, le contexte actuel est radicalement différent : il doit ainsi être reconsidéré en synergie avec d’autres points de contact. Les défis à relever et les atouts à valoriser pour un magasin physique s’en trouvent renouvelés.
Magasin physique, e-commerce, m-commerce : moins concurrents que complémentaires
Les consommateurs ont adopté divers comportements de magasinage qui articulent terminal mobile (applications et Internet mobile), Internet fixe et magasin physique. Les possibilités pour réaliser un parcours d’achat se sont ainsi multipliées et enrichies : les consommateurs cherchent à établir des combinaisons pour optimiser leurs expériences de magasinage, selon la situation.
Du statut de canal unique à celui de point de contact parmi d’autres
Le consommateur imbrique désormais canaux physiques et canaux virtuels dans son comportement de magasinage : le magasin a perdu son statut de canal unique. L’analyse des usages du téléphone intelligent révèle, par exemple, qu’il est devenu un compagnon clé de magasinage dont l’impact va s’accentuer à mesure de son utilisation croissante.
Le téléphone intelligent peut tout d’abord faire fréquenter un magasin physique : les occasions d’obtenir un trafic qualifié
Le trafic qualifié désigne le nombre d’internautes...
 sont réelles compte tenu du taux de transformation encore faible.
Le cadre expérientiel du magasin physique doit alors réussir la conversion. Il peut ensuite s’intégrer à l’expérience en magasin physique : lorsqu’un terminal connecté y est utilisé, il en enrichit la phase d’évaluation (recherche d’informations, sollicitations d’avis par téléphone ou à travers les réseaux sociaux numériques), la facilite (liste de courses, repérage en magasin par géolocalisation, carte de fidélité, paiement mobile), ou y met un terme par l’achat directement sur un téléphone intelligent.
Il peut enfin faire quitter le magasin physique sans achat : les mobinautes peuvent reporter leur achat après consultation de leur téléphone intelligent en magasin.
Les atouts de ces nouvelles formes de commerce bousculent le format du magasin physique. Avant l’arrivée des téléphones intelligents, le consommateur ne pouvait mobiliser les canaux que successivement : il pouvait, par exemple, rechercher des informations en magasin, puis acheter sur Internet et se faire livrer le produit à domicile. Le téléphone intelligent, par ses caractéristiques d’ubiquité et d’accessibilité, lui permet désormais de mobiliser simultanément plusieurs canaux. Cette évolution des comportements de magasinage conduit à anticiper la fin de la dichotomie entre commerce physique et commerce virtuel.
L’e-commerce, le m-commerce et le magasin physique doivent être vus moins comme des canaux distincts et concurrents que comme des points de contact complémentaires. Les enseignes et les marques cherchent à élaborer des stratégies qui intègrent tous les points de contact – stratégie dite « omnicanal » – pour se concentrer sur la relation avec le client afin de proposer un service cohérent et personnalisé créateur de valeur. Cela amène à redessiner le magasin traditionnel appelé à jouer des rôles différents dans un paysage commercial en recomposition.
Des cadres d’expériences à repenser
Une double logique est au cœur de la gestion du magasin physique : l’une de nature fonctionnelle, liée à l’échange marchand, et l’autre de nature ludique et hédoniste de visite. De cette combinaison naît un cadre d’expériences voulu par l’entreprise, c’est-à-dire des principes d’organisation qui donnent un sens à une situation.
Ce contexte spécifique d’expérience de magasinage permet de constituer l’offre et de mieux la positionner. Cet angle d’analyse expérientiel de l’activité de magasinage est considéré comme central en distribution. « Une expérience a lieu lorsque l’entreprise utilise intentionnellement des services en tant que scène et des marchandises en tant qu’accessoires, pour entraîner les clients individuels d’une manière qui crée un événement mémorable »
Il s’agit ainsi de mêler l’offre de produits à l’atmosphère au point de vente pour orchestrer un temps fort pour le consommateur, que ce dernier s’appropriera. Dans la perspective de l’avenir du magasin physique, il importe donc d’imaginer et de mettre en œuvre de nouveaux cadres d’expériences pertinents qui en exploitent les atouts et répondent aux défis qu’entraîne l’articulation du magasin physique avec d’autres points de contact.
Quatre défis à relever par les magasins physiques
La réalité physique du magasin génère un ensemble de rigidités révélées à la lumière des caractéristiques clés de l’e-commerce et du m-commerce. Quatre principaux défis sont à relever.
Défi 1 : Élargir, renouveler et individualiser l’offre
La première rigidité est celle de l’offre en magasin – qui compte un nombre de références limité par sa capacité – faisant face à l’accessibilité et à l’immédiateté caractéristiques des nouveaux points de contact. Le distributeur en ligne de mode ASOS compte ainsi 70 000 références offertes en permanence et 2 000 nouveautés mises en ligne chaque semaine. La problématique de l’attractivité liée à l’assortiment, appréciée par les consommateurs à travers la recherche de variété et la présentation des nouveautés, se trouve ainsi renouvelée : comment établir un assortiment face à une offre infinie et immédiatement consultable ? La mise au point de dispositifs en magasin permettant d’accéder à l’ensemble des références proposées dans les autres points de contact constitue une solution. Une autre solution consiste à rendre l’offre spécifique au magasin physique par des séries limitées, comme celles offertes chaque année par l’enseigne H&M et un créateur.
Défi 2 : Synchroniser le contenu informationnel avec celui des autres points de contact
La deuxième rigidité est celle du contenu informationnel en magasin au regard du caractère informatif caractéristique des autres points de contact. Le consommateur a un accès immédiat et illimité à l’information, qu’il s’agisse de la comparaison de prix, de la recherche de bonnes affaires, d’informations sur les produits ou d’avis. Comment élargir l’information dans le magasin physique ? La dimension d’aide au choix qui est sous-jacente conduit à s’interroger sur les moyens de mieux informer le client en magasin. Il semble particulièrement important de reconsidérer le rôle du personnel de la relation client et les outils à sa disposition pour qu’il puisse répondre aux questions d’un client surinformé.
Défi 3 : Flexibiliser la localisation et les heures d’ouverture
La troisième rigidité est celle du format en termes de localisation et d’heures d’ouverture, qui subissent la concurrence de la dimension ubiquitaire des autres formes de commerce. Comment aller à la rencontre du client et rendre les ventes possibles à tout moment ? Nomadiser le magasin constitue une piste de travail intéressante, illustrée par la stratégie de Glagla Shoes – marque de chaussures de sport ventilées –, qui propose ses produits à l’essai dans des salles d’entraînement physique. Une autre piste consiste à intégrer des dispositifs numériques digitaux à la vitrine afin d’en dépasser la dimension statique et d’ouvrir virtuellement le magasin.
Défi 4 : Faire évoluer continuellement le design et l’atmosphère pour susciter l’intérêt
La quatrième rigidité est celle du design et de l’atmosphère en magasin, mis à l’épreuve de l’instantanéité des nouveaux points de contact. Cette tendance du temps réel suscite un besoin de renouvellement permanent et, dans le cadre du magasin physique, conduit à une obsolescence rapide de l’offre expérientielle. Comment dynamiser la mise en œuvre de stratégies expérientielles et en renouveler l’attrait pour le client ? Émerge un besoin d’agilité organisationnelle en matière de design et d’atmosphère en magasin – les outils de positionnement pour enrichir les expériences de consommation – afin d’anticiper et d’innover en permanence : l’organisation d’événements en magasin est un moyen de répondre à cet objectif.
Cinq atouts à valoriser par les magasins physiques
La réalité physique du magasin est une source d’atouts qui lui sont spécifiques et qui doivent être valorisés dans les cadres d’expériences proposés aux clients.
Atout 1 : Voir, toucher, essayer et tester le produit
L’interaction directe avec le produit permet au consommateur de s’informer, de se rassurer tout en passant un moment agréable, nourrissant trois sources importantes de valeur de l’expérience de magasinage. La multiplication des points de contact où il est possible d’acheter exige d’aller, en magasin, au-delà de la présentation des produits. Il est important d’en montrer les usages possibles en mobilisant des axes tels que le magasin comme lieu de pédagogie ou lieu d’expériences. Ainsi, l’enseigne Du Bruit dans la Cuisine organise ses magasins comme des espaces de découverte, de rencontre et d’initiation, avec un lieu dédié à la démonstration culinaire où un chef partage sa passion et son savoir-faire chaque jour.
Atout 2 : Obtenir immédiatement le produit
Un avantage clé du magasin physique est que le consommateur peut y disposer du produit immédiatement. Cette obtention du produit sans délai répond à l’objectif utilitaire du magasinage, mais aussi à celui de stimuler les achats d’impulsion. C’est donc un atout à exploiter sur le plan de la commodité et dans une perspective hédoniste.
Atout 3 : Offrir des expériences immersives et une stimulation plurisensorielle directe
Dans un magasin traditionnel, le cadre d’expériences s’inscrit dans le lieu physique : il peut alors mobiliser les cinq sens. Ceux-ci sont autant de variables d’action – que les autres points de contact ne peuvent mobiliser en totalité – dont dispose l’enseigne pour que l’expérience en magasin physique soit créatrice de valeur pour le consommateur. Le choix d’un thème pour le magasin physique dans une logique de réenchantement est un axe d’un intérêt incontestable pour attirer le. Afin d’en optimiser les chances de succès, il faut approfondir la réflexion sur la stratégie expérientielle mise en œuvre, les Apple Stores fréquentés par plus de 400 millions de clients en 2012 étant un exemple de référence. Le magasin physique est, dans ce contexte, un outil de communication majeur en dehors des médias et un vecteur d’image pour l’enseigne.
Atout 4 : Interagir en face à face de manière personnalisée avec le personnel de la relation client
Le développement de points de contact virtuels renforce les attentes relationnelles en magasin tout en les réorientant dans différentes directions. Il les réoriente d’abord vers une efficacité et des compétences accrues : l’asymétrie de l’information est renversée ; très bien renseigné, le client recherche une expertise ou fait partie d’une communauté d’experts. Il les réoriente ensuite vers une écoute et une empathie plus grandes : face au refus des sollicitations commerciales pressantes, le rôle du « vendeur » est moins de vendre que d’accompagner. Il les réoriente enfin vers une authenticité accrue : l’avenir du magasin exige de restaurer un lien de confiance et de créer une relation plus profonde et plus riche avec les consommateurs. Le lien social dans la relation de service peut devenir un outil de fidélisation des consommateurs, mais il impose d’adopter une logique innovante de gestion des ressources humaines

Atout 5 : Rencontrer d’autres consommateurs
La socialisation entre clients est un point fort d’attachement au magasin physique. L’influence de cette dimension sociale appelle à faire de celui-ci un lieu signifiant pour ses clients. Il importe donc de faciliter les modes d’expression de la socialisation entre clients, par exemple en développant un esprit communautaire ou en favorisant les rencontres. Dans cette logique, l’enseigne indépendante Le Chant de l’Alouette propose à ses clients des stages de musique avec des musiciens professionnels, faisant du magasin un lieu de rencontre.
La conception et la mise en œuvre de cadres d’expériences adaptés exigent de décider quels atouts intrinsèques mettre en valeur et de prendre position au regard des défis auxquels fait face le magasin physique. Que faut-il offrir dans le point de contact « magasin physique » dans un contexte omnicanal ? Les initiatives se multiplient et les déclinaisons possibles du magasin physique de l’avenir sont nombreuses. Face à la multiplicité des tentatives, une prise de recul permet de dégager des axes forts montrant que l’avenir du magasin physique se dessine dans la conception de différents formats de magasins qui répondent à des besoins variés.
Cinq voies d’avenir du magasin physique
Face aux défis et aux atouts précédents, le magasin physique a tout intérêt à considérer les cinq voies d’avenir suivantes : le magasin éphémère, tiers-lieu, vitrine, digitalisé ou virtuel.
Stimuler l’attrait en renouvelant la théâtralisation : le magasin éphémère
Conçu pour durer, le magasin physique peut devenir temporaire. Un magasin éphémère est un magasin délibérément ouvert pour une courte période, de quelques jours à quelques mois. Le cadre d’expériences proposé, différent à chaque opération, relève le défi de l’instantanéité tout en exploitant la dimension des expériences immersives et plurisensorielles. Il est une réponse au vieillissement rapide de l’attrait du magasin physique, à travers une théâtralisation renouvelée. L’attraction y est stimulée par le caractère passager de l’opération, qui suscite l’étonnement et la curiosité chez les parties prenantes (clients potentiels, clients actuels, prescripteurs, journalistes). Le magasin physique éphémère est un lieu d’expression à part entière : l’originalité et la créativité des cadres de participation et de stimulation sensorielles – architecture extérieure, localisation, design, marchandisage, atmosphère – sont travaillées pour faire vivre une expérience mémorable au bon endroit et au bon moment à la cible, qui la relaie par un bouche à oreille réel ou virtuel. Ce point de contact physique éphémère peut poursuivre différents objectifs : expliquer une compétence liée au produit ou au métier (le bar à bottes éphémère Aigle pour le métier de caoutchoutier), exposer l’univers et les valeurs de la marque (le magasin éphémère du joaillier de luxe Hublot à Singapour), instaurer une relation participative et ludique avec la marque (le magasin éphémère Sandro à Paris, où le client vient personnaliser ses chaussures), offrir une vitrine physique à une enseigne virtuelle pour aller à la rencontre de sa clientèle (Spartoo.com Shoes & Spa dédié au bien-être des pieds), accompagner l’internationalisation d’une marque (le magasin éphémère UNIQLO dans les grandes capitales) ou enfin répondre à la saisonnalité de l’activité (Oxybul Éveil et Jeux durant la période de Noël). L’opération prend tout son sens à travers les synergies qu’elle génère avec les autres points de contact.
Le magasin éphémère Starbucks Expresso Journey à Tokyo
Dans un contexte concurrentiel difficile, l’enseigne Starbucks s’efforce de consolider sa place de leader au Japon. Dans cette perspective, elle a ouvert un magasin éphémère. Situé dans un quartier à la mode, le magasin éphémère Starbucks Expresso Journey ressemble à une bibliothèque. Le client feuillette l’espace où chaque livre de la bibliothèque a une couleur symbolisant une boisson : expresso, cappuccino, café au lait, etc. La commande se fait par l’échange d’un livre sur la tranche duquel est indiqué le café souhaité.
Ce magasin éphémère cible les clients usuels de l’enseigne pour renforcer le rapport à la marque et la fréquentation des magasins usuels.
Établir une relation riche et profonde avec le consommateur : le magasin tiers-lieu
Le magasin physique peut être décentré de sa finalité marchande, mise au second plan, pour se focaliser sur sa dimension relationnelle : il a pour atout d’être le seul point de contact à pouvoir permettre les relations interindividuelles. Le cadre d’expériences valorise alors la socialisation au lieu de vente, renouvelant la thématique du réenchantement axé sur l’extra-ordinaire ou l’infra-ordinaireet offrant à la marque des perspectives nouvelles en matière de positionnement. Qualifiés de « magasins lieux de vie », ces magasins physiques répondent, au regard des projets qui les sous-tendent, au concept sociologique de tiers-lieu, qui désigne un lieu hospitalier et confortable, fréquenté par un public d’habitués. Il prolonge la maison (premier lieu) dans la sphère publique indépendamment du travail (deuxième lieu). Les échanges et les conversations en sont le cœur. Il s’agit d’un lieu de rassemblement et de socialisation informel et d’un point d’ancrage de la vie communautaire.
Un magasin tiers-lieu représente un endroit dont l’atmosphère chaleureuse invite le client à entrer pour se détendre et qui est façonné par les rencontres entre clients. Si la marque propose un cadre, l’atmosphère du magasin est le résultat d’une co-production collaborative. Ainsi, la marque Adidas a ouvert l’Adidas Runbase à l’entrée d’un parc très apprécié des coureurs à Tokyo, magasin qui fait office de club de sport avec douches et casiers où les coureurs se retrouvent. Le magasin tiers-lieu revêt un sens comme voie d’avenir dans sa capacité de nourrir une relation entre une marque et une communauté, relation qui va irriguer les autres points de contact. Les clients y sont moins conseillés par des vendeurs qu’accompagnés de « médiateurs » qui donnent, en dehors de scripts préétablis codifiant les relations, des suggestions favorables à la marque. Ce cadre d’expériences tourne le dos à l’industrialisation de la relation client ; il est une forme de retour aux sources du commerce.
L’Apartment 32 de Weatherproof à New York
La marque américaine de vêtements Weatherproof a ouvert l’Apartment 32, magasin physique pensé comme un véritable appartement où les clients peuvent se détendre, prendre un verre en sympathisant avec d’autres personnes présentes notamment au cours de la nocturne hebdomadaire. Il leur est recommandé de laisser leurs téléphones portables avant d’entrer. L’assortiment de produits exposés est limité afin de ne pas surcharger l’espace. Les clients, appelés « invités », doivent s’y sentir comme chez des amis ; ils y sont accueillis par des « résidents ».
L’Apartment 32 est un lieu créateur de lien social, où la marque Weatherproof communique avec ses clients en entretenant le dialogue entre eux, sans démarche de vente intrusive.
Donner à voir la marque et les produits : le magasin vitrine
Dans une logique de salle d’exposition assumée, le magasin physique peut être pensé dans son intégralité comme une vitrine, c’est-à-dire comme un espace dédié à la présentation d’une marque et de ses produits, sans qu’un achat puisse y être réalisé. Inscrit dans une stratégie omnicanal, le magasin physique est mis au service des autres points de contact dans lesquels la transaction sera finalisée : il devient ainsi un lieu indirect de vente. Le cadre d’expériences d’un magasin vitrine valorise à l’extrême l’atout de rapports directs au produit et au personnel de la relation client, et cherche à répondre aux attentes hédonistes, informationnelles et de rassurance des consommateurs. Ce cadre d’expériences est orchestré pour accompagner le client dans sa recherche d’informations et lui donner confiance en lui offrant de vivre un moment agréable. Il met en récit l’histoire et la culture de la marque (L’Atelier Renault « donnant à voir l’univers d’une marque mythique »), retrace le processus d’inspiration et de fabrication des produits ou des services (l’espace Réunica Domicile, ouvert par la mutuelle du même nom, dédié à la problématique de la dépendance des personnes âgées) et constitue un espace de démonstration de leurs usages possibles (la Galerie Miele, où le cuisiniste fait intervenir un chef cuisinier). Les modèles sont présentés de façon exhaustive, avec un marchandisage abouti. Le magasin vitrine se consacre ainsi à l’enrichissement expérientiel du territoire de la marque. Il supporte l’établissement de relations avec les consommateurs mais aussi avec les différentes parties prenantes – fournisseurs, détaillants, revendeurs ou journalistes.
Intégrer les technologies numériques : le magasin digitalisé
Le magasin digitalisé est aujourd’hui la voie d’avenir la plus explorée. Les technologies numériques sont vues comme une occasion au service de la valeur de l’expérience de magasinage au sein du magasin physique. L’objectif est de faire vivre au client une expérience marquante grâce à un aménagement spatial et des stimulations sensorielles liées aux technologies numériques, qui enrichissent le magasin physique usuel. Un magasin digitalisé désigne un lieu de vente physique intégrant une ou plusieurs technologies numériques interactives (bornes, tablettes tactiles, applications mobiles dédiées, sites mobiles, etc.) qui peuvent être utilisées par les clients ou par le personnel de la relation client. Elles peuvent être connectées au Web. Une telle démarche est pensée comme un pont entre le magasin physique et le site Web de la marque.
Le Rendez-Vous Toyota à Paris
Le Rendez-Vous Toyota est la vitrine unique de la marque en Europe. Toyota formule la promesse suivante aux clients ainsi qu’aux revendeurs et aux professionnels, les cibles de cet espace : « Expositions des dernières technologies, voitures Toyota d’aujourd’hui et de demain, événements permanents et saisonniers : il y a tant à voir, à vivre et à expérimenter dans notre salle d’exposition ! »
Le cadre d’expériences s’inspire des valeurs fondamentales de Toyota que sont le design, la qualité supérieure et l’innovation, pour améliorer son image et son positionnement auprès de ses visiteurs dans une localisation commerciale prestigieuse, l’avenue des Champs-Élysées à Paris, fréquentée par une clientèle aussi bien étrangère que française.
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Le cadre d’expériences d’un magasin digitalisé relève les défis de l’immédiateté et du caractère informatif à travers le recours à différents dispositifs numériques dont la nature et les intérêts sont exposés dans le tableau 1. Ceux-ci renforcent le contact direct avec le produit en y apportant un contenu informationnel et un rapport ludique (le Fragrance Finder de Sephora, borne tactile permettant de guider les clients de cette enseigne vers le parfum le mieux adapté à leurs goûts), en améliorant la qualité de la relation client en magasin (des conseillers Mercedes équipés de tablettes tactiles pour accéder aux préférences des clients) et en personnalisant la relation par sa dimension interactive (la personnalisation de l’instant d’essayage chez Gomus avec des vêtements équipés d’une puce d’identification par radiofréquence [RFID] contenant des informations sur le style du vêtement concerné et déclenchant la diffusion en cabine d’une musique adaptée au vêtement). Ces dispositifs peuvent être utilisés à bon escient pour fluidifier l’expérience en magasin, en éliminant l’attente à la caisse ou en cartographiant le magasin sur un téléphone intelligent afin d’offrir de la géolocalisation intérieure.
Burberry au 121 Regent Street à Londres
Incarnation physique de son site Web, le nouveau lieu de vente de la marque Burberry a pour ambition de faire converger le monde numérique et le monde physique et utilise pour cela divers dispositifs. Les employés sont équipés de tablettes pour consulter l’historique des achats et les préférences d’un client. Grâce à ce terminal, le client peut créer « le trench-coat de ses rêves » comme sur burberry.com. Certaines fonctionnalités présentes sur les lieux visent à répondre aux attentes précises des clients en temps réel. Cinq cents enceintes et 100 écrans sont déployés pour diffuser le monde virtuel dans le monde réel. Des écrans interactifs sont disposés en tête de chaque rayon et projettent des vidéos dédiées aux vêtements. Des puces RFID sont intégrées à certains articles pour proposer des produits associés au client, qui peut régler ses achats sur un terminal de paiement mobile. Des expositions temporaires et permanentes sont organisées dans une galerie numérique.
Tableau 1 - Description des dispositifs et de leurs fonctions à chacune des étapes du parcours client dans le cadre d’un magasin digitalisé
Développer l’ubiquité : le magasin virtuel
Le magasin physique peut être repensé de façon radicale pour répondre aux nouvelles pratiques de mobilité des consommateurs. Ces derniers s’efforcent d’optimiser leur mobilité dans une double dimension temporelle et spatiale. Ils ne se déplacent plus pour magasiner, mais ils magasinent au fil de leurs déplacements (travail, loisirs, école). Le magasin physique peut alors être repensé pour se trouver « au bon endroit au bon moment », avec un cadre d’expériences qui relève le défi de l’ubiquité.
Cette évolution la plus radicale du magasin physique a commencé à la mi-2011 avec Tesco et sa filiale sud-coréenne Homeplus, qui a créé le premier magasin physique virtuel. Situé au cœur des pérégrinations des consommateurs, dans des zones de transit et de flux comme les gares, les aéroports ou les métros, un magasin virtuel consiste en un mur ou un cube équipé d’une borne Wi-Fi sur lequel un nombre limité de références présentées en photos est proposé à la vente. Le magasin se résume à un linéaire virtuel où le client balaie les codes-barres 2D avec un téléphone intelligent et l’application mobile de l’enseigne pour constituer son panier, puis passer la commande. S’inscrivant dans une perspective omnicanal, il imbrique de façon indissociable, dans le comportement de magasinage des consommateurs, les points de contact réels et virtuels. Le magasin virtuel donne une dimension physique à l’application mobile.
Le supermarché virtuel Tesco à l’aéroport de Londres Gatwick
Le concept consiste à proposer aux voyageurs, pendant les 70 minutes de temps libre en moyenne qu’ils ont avant d’embarquer, d’effectuer les achats alimentaires dont ils auront besoin à leur retour de vacances à travers quatre linéaires virtuels ainsi que six écrans numériques tactiles répartis dans la zone de départ. Le client balaie le produit souhaité à l’aide de son téléphone intelligent et de l’application préalablement téléchargée. Le délai de livraison se différencie des délais proposés usuellement : les achats peuvent être livrés jusqu’à trois semaines après la commande. Le client commande en partant et reçoit ses achats à son retour, ce qui le libère de la corvée des courses ordinaires. Finie l’angoisse du frigo vide !

Présentées successivement, ces différentes voies d’avenir du magasin physique peuvent être mobilisées simultanément, entre autres dans des magasins éphémères digitalisés ou dans des magasins vitrines tiers-lieux.
Le succès de la mise en œuvre de ces voies d’avenir requiert toutefois de nombreuses adaptations.
Repenser le magasin physique : implications et conditions de succès
La réalisation de différents cadres d’expériences, qui s’inscrivent dans la perspective du client sous-jacente à une stratégie omnicanal, sollicite l’ensemble des compétences de l’entreprise et remet en question bien des choses. Les implications stratégiques et organisationnelles, qui sont importantes, demandent à être maîtrisées pour que l’évolution soit réussie.
Repenser le modèle d’affaires : de la vision du magasin comme usine à vendre à de nouveaux critères de performance
Historiquement, un magasin physique a pour mission de vendre et sa performance est appréhendée quantitativement.
Dans un contexte omnicanal, il devient un point de contact parmi d’autres, entre lesquels le chiffre d’affaires se répartit. Selon les critères classiques de performance d’un magasin, le diagnostic d’une dégradation de celle-ci est posé, justifiant une rationalisation du réseau de magasins physiques. Or, dans un contexte omnicanal, aborder la performance d’un magasin physique demande une vision élargie : est-il capable de constituer un relais de rassurance dans l’acte d’achat, de nourrir la relation avec la marque et de jouer le rôle de média ? Quel est son rôle dans le chiffre d’affaires généré dans les autres points de contact ? La performance ne peut être corrélée avec le chiffre d’affaires réalisé en son sein. La rentabilité perd de son sens au niveau individuel : certains magasins vont peu vendre – voire ne pas vendre du tout dans le cas des magasins vitrines – pour permettre à d’autres de vendre beaucoup. Certaines structures organisationnelles – notamment les réseaux franchisés – sont particulièrement sensibles à ce défi.
Repenser la stratégie marketing : imaginer un magasin physique à l’échelle de son rôle au sein du réseau
À l’échelle du réseau, les différents magasins physiques auront des objectifs et des rôles différents : une spécialisation des différents magasins dans les objectifs qu’ils poursuivent s’avère nécessaire. Il importe d’expliciter au client l’enrichissement que chacun d’eux apporte à l’expérience de magasinage afin de l’orienter entre les différents cadres d’expériences proposés. Pour organiser le réseau comme un portefeuille de points de contact répondant à des attentes différentes, la nature des expériences recherchées à chacun de ceux-ci doit être comprise. Les contextes expérientiels doivent en effet être imaginés en fonction des situations : pour cela, il faut mettre au point des moyens de connaissance du parcours du client.
Repenser les systèmes d’information pour établir des moyens de connaissance du parcours du client
Il est crucial de pouvoir intégrer les données en provenance de tous les points de contact afin de suivre l’historique du parcours du client. Dans ce contexte, les systèmes d’information actuels se révèlent obsolètes. Il s’agit non seulement de multiplier les points de contact avec le client, mais d’être en mesure de reconnaître ce dernier tout au long de son parcours. Cela exige d’unifier de multiples bases de données qui ont été initialement conçues pour chaque canal de vente. Un système d’information transversal est nécessaire si l’on veut cartographier les parcours des clients actuels et découvrir les points de blocage éventuels dans un parcours omnicanal de magasinage. Le stockage et l’analyse de grandes masses de données représentent un enjeu majeur pour réussir à transformer celles-ci en informations signifiantes, puis en actions.
Repenser la logistique
La problématique de gestion des stocks est renouvelée par les pratiques d’achat en magasin après une recherche d’informations en ligne ou de retrait en magasin après l’achat en ligne. Ce service constitue un trait d’union entre le magasin physique et le magasin en ligne, mais il rend plus délicate la gestion des stocks. Le produit doit être disponible au bon endroit et de façon immédiate pour le client habitué au temps réel.
Repenser la gestion des ressources humaines
Quel que soit le point de contact où la personne travaille, celle-ci doit être concernée par la réussite de tous. Les enjeux en termes de recrutement, de formation, de rémunération mais aussi d’engagement au travail sont nombreux. Le contenu du travail du personnel de la relation client se trouve modifié. Home Depot se dote ainsi d’une technologie qui simplifie les processus (gestion des stocks, analyse des ventes, encaissement) pour libérer du temps de conseil au client pour les vendeurs. De même, il faut revoir la rémunération afin d’inciter ces derniers à favoriser l’offre, quel que soit le point de contact. Il peut alors être pertinent d’indexer la prime des collaborateurs non plus sur le chiffre d’affaires d’un magasin, mais sur celui d’une zone géographique beaucoup plus large.
Repenser les rôles d’un magasin physique et le transformer exige une évolution à tous les niveaux de l’entreprise pour s’orienter vers une plus grande transversalité. La gestion du changement est au cœur de la réussite du dispositif.

Conclusion

L’avenir du magasin physique n’est pas sa mort mais sa transformation, qui se révèle complexe pour être en cohérence avec la multiplicité des comportements de magasinage des consommateurs. Ceux-ci demeurent attachés aux magasins physiques, tout en aspirant à une évolution stimulée par les nouvelles formes de commerce dont ils souhaitent trouver un prolongement dans ces magasins physiques. Certaines voies d’avenir tirent profit d’atouts intrinsèques ou dépassent les rigidités devenues inacceptables au regard de la proposition de valeur d’autres points de contact. Les magasins demeurent des lieux physiques de rencontre entre un consommateur, un produit et un vendeur, qui est un conseiller de la marque ou de l’enseigne : ils sont une source de valeurs essentielles pour l’expérience de magasinage que les points de contact virtuels ne peuvent offrir. Si le changement est amorcé, le défi est sérieux dans le cas de modèles d’affaires non stabilisés : le magasin est mort, vive le magasin !