lundi 19 août 2013

Du culte de la performance au marketing du résultat

Les médias bruissent de la rumeur de la sortie imminente d'un nouvel iPhone : s'agira-t-il d'une version low cost aux caractéristiques « dégradées » de l'actuel iPhone 5 ou bien d'un modèle plus élaboré que l'actuel ? Et avec quel niveau de performance ? Le capteur photo restera-t-il à 8 mégapixels ? Son ouverture serat-elle portée à f/2.0 ? Bref, des interrogations fondamentalement existentielles, convenons-en, et qui placent le débat sur un terrain qu'il serait peut-être judicieux de désormais éviter : celui du culte de la performance.

Car il y a deux raisons qui militent pour le fait de ne plus - ou pas uniquement - raisonner en termes de performance : la première est que, compte tenu des avancées technologiques de plus en plus rapides, les systèmes et composants connaissent une obsolescence accélérée - se voyant perpétuellement remplacés par de nouvelles générations de systèmes et composants encore plus performants - et, surtout, étendent cette obsolescence aux produits dans lesquels ils prennent place ; la seconde est qu'une fois ces systèmes et composants intégrés dans les offres de l'ensemble des acteurs du marché, le prix devient la seule variable d'ajustement concurrentiel.
C'est ainsi que la boucle est… bouclée : en développant le culte de la performance, les industriels s'inscrivent de façon quasi automatique dans une configuration de pression tarifaire, soit qu'ils n'aient rien à dire de plus que les autres, soit que les performances affichées se situent en deçà de la moyenne du marché, faute d'avoir réagi assez vivement.
Il serait donc plus que temps de sortir de cette spirale qui n'a rien de vertueuse : elle pousse au laminage des marges des fabricants tout autant qu'elle contribue à dévaloriser les offres aux yeux des consommateurs, qui savent pertinemment que ce qu'ils achètent à l'instant t est forcément plus coûteux et « moins bon » que ce qu'ils pourraient acheter à t + 1.
Alors comment procéder ? Passons dans le domaine automobile et examinons les deux marques Audi et Opel. D'un côté, Audi et ses produits « parfaits » et de l'autre, Opel avec son bagage ultratechnologique : même si le premier clame : « L'avance par la technologie » et le second : « Nous vivons l'automobile », la réalité est quelque peu différente.
Audi mise sur la perfection globale du produit en proposant à ses clients une promesse claire, lisible et crédible : se déplacer dans un véhicule exceptionnel de justesse et d'harmonie. Et la performance alors ? Dans le cas présent, nous serions plutôt enclins à parler de priorisation du résultat par rapport à la performance : c'est le principe du plaisir de conduite servi par une technologie de haut niveau mais discrète.
Opel, lui, ne joue pas dans ce registre. Le constructeur a en portefeuille des modèles évolués d'un point de vue technologique, dotés en série ou en option d'équipements à la pointe du moment (phares adaptatifs, caméra reconnaissant les panneaux, etc.) Tout cela est effectivement bien alléchant… mais pour quoi faire ?
Ce qui intéresse le consommateur, c'est avant tout un résultat qualifiable, une sorte de standard qu'il comprendra instantanément et avec lequel il pourra s'accorder - et, là, Opel ne délivre pas vraiment de message. Nous sommes davantage dans un espace de systèmes et de composants tributaires du temps qui passe, plutôt que dans un univers logique et homogène où le résultat prime le procédé : on empile les briques technologiques sans proposer de vision globale.
Que constate-t-on au travers de ces exemples ? D'un côté, il y a la performance dont chaque élément constitutif peut s'apprécier isolément - c'est tout l'intérêt et la pauvreté des « benchmarks » - et de l'autre un résultat qui se présente comme une proposition claire, logique et monobloc. C'est un tout.
Il y a donc autant de différences entre une performance et un résultat qu'entre les notions d'évolution et de progrès : d'un côté des gestes, de l'autre un mouvement cohérent et positif.
Sur un plan opérationnel, la démarche marketing orientée résultat va « obliger » l'entreprise à considérer différemment les réels besoins du marché - c'est là, au passage, que le concept de valeur d'usage prendra tout son intérêt -, et finalement faire en sorte de rendre la technologie peu ou pas apparente, dans le but de réduire au maximum les interfaces successives entre le consommateur et l'obtention du résultat.

Pour en revenir à Apple, la firme était du temps de Steve Jobs un champion incontesté de cette culture du résultat : le premier slogan de l'iPhone promettait tout simplement « Internet dans votre poche ». Face à la concurrence d'un géant technologique comme Samsung, elle doit veiller à garder cette trajectoire, sans chercher à se battre sur le terrain des résultats.

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