mercredi 3 avril 2013

L'open data aurait-il pu éviter le scandale du Mediator

En janvier 2013, l’initiative Transparence Santé rassemblant des journalistes, des représentants d’usagers de santé, des assureurs, des entrepreneurs, des chercheurs et des consultants publiait un manifeste appelant à l'ouverture des données publiques de santé, afin de permettre à la société civile d’y accéder en toute transparence.
Le 12 février, la pétition rassemble 1540 signataires dont Pascal Crépey, enseignant-chercheur en épidémiologie et biostatistiques à l’EHESP, et Pascal Astagneau, professeur de santé publique à l’EHESP, qui signent cette tribune.

Les scandales du Mediator et peut-être de Diane 35 donnent de la voix aux défenseurs de la transparence en santé. Dans ce domaine, l'open-data, au-delà du simple contrôle, est en mesure de transformer radicalement les modes de prévention, de détection et de gestion de crise.

Explication de texte

Avec l'ouverture des données, le scénario dans le cas d'une détection de foyer de dengue pourrait être celui-ci : "en raison d'une chute inquiétante de la couverture vaccinale, la zone affectée était sous surveillance depuis quelques mois. C'est une hausse anormale des ventes d'antipyrétiques, confirmée par un accroissement des consultations médicales pour fortes fièvres et violentes céphalées, qui a déclenché l'alerte. Les suites de la crise ont pu être gérées grâce à l'analyse textuelle des réseaux sociaux et des plateformes de micro-blogging permettant d'adapter les messages d'information et de prévention. Après quelques heures d'anxiété suite à l'annonce de la découverte, l'effervescence est retombée sans qu'aucune 'surconsommation médicamenteuse de crise' ne soit constatée."

Dans la réalité, la dengue n'est aujourd'hui qu'aux portes de l'Europe. Un futur vaccin devrait couvrir la population de façon uniforme. Cependant des défauts de couverture localisés briseraient l'immunité « grégaire » de la population ; comme ceux qui ont favorisé une résurgence de la coqueluche aux Etats-Unis. Demain, le suivi des données de ventes de vaccins en pharmacie pourrait immédiatement mettre en alerte une zone « découverte ».

Des réseaux de médecins « sentinelles » existent déjà mais sont en général focalisés sur des maladies précises. Les ventes de médicaments (prescrits ou non) sont recueillies mais encore peu exploitées. Les feuilles de soin électroniques le seront peut-être un jour. Ces données permettraient de détecter des maladies émergentes, encore inconnues : les cas détectés dès les premiers symptômes, mais surtout avant l'extension du foyer.

Suivre les comportements avec Twitter

Si les réseaux sociaux nous rapprochent les uns des autres, leurs données peuvent aussi rapprocher les autorités de santé des préoccupations de la population. Des travaux récents ont montré la pertinence de l'analyse des messages Twitter pour suivre les comportements de santé. En France, pendant la crise de Fukushima, les messages de l'Autorité de Sûreté Nucléaire n'avaient pu empêcher une partie de la population de s'approvisionner inutilement en produits iodés (le plus souvent en homéopathie). Or, produire une information plus adaptée aux besoins des citoyens exige une meilleure compréhension des pratiques et des perceptions.

Parce qu'il offre une haute résolution spatiale en temps réel, l'accès public aux données de santé confère aux chercheurs, aux entreprises et aux citoyens les outils pour construire la surveillance sanitaire de demain.

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