Les médias bruissent de la rumeur de la sortie imminente d'un nouvel iPhone : s'agira-t-il d'une version low cost aux caractéristiques « dégradées » de l'actuel iPhone 5 ou bien d'un modèle plus élaboré que l'actuel ? Et avec quel niveau de performance ? Le capteur photo restera-t-il à 8 mégapixels ? Son ouverture serat-elle portée à f/2.0 ? Bref, des interrogations fondamentalement existentielles, convenons-en, et qui placent le débat sur un terrain qu'il serait peut-être judicieux de désormais éviter : celui du culte de la performance.
Car il y a deux raisons qui militent pour le fait de ne plus - ou pas
uniquement - raisonner en termes de performance : la première est que, compte
tenu des avancées technologiques de plus en plus rapides, les systèmes et
composants connaissent une obsolescence accélérée - se voyant perpétuellement
remplacés par de nouvelles générations de systèmes et composants encore plus
performants - et, surtout, étendent cette obsolescence aux produits dans
lesquels ils prennent place ; la seconde est qu'une fois ces systèmes et
composants intégrés dans les offres de l'ensemble des acteurs du marché, le prix
devient la seule variable d'ajustement concurrentiel.
C'est ainsi que la boucle est… bouclée : en développant le culte de la
performance, les industriels s'inscrivent de façon quasi automatique dans une
configuration de pression tarifaire, soit qu'ils n'aient rien à dire de plus que
les autres, soit que les performances affichées se situent en deçà de la moyenne
du marché, faute d'avoir réagi assez vivement.
Il serait donc plus que temps de sortir de cette spirale qui n'a rien de
vertueuse : elle pousse au laminage des marges des fabricants tout autant
qu'elle contribue à dévaloriser les offres aux yeux des consommateurs, qui
savent pertinemment que ce qu'ils achètent à l'instant t est forcément plus
coûteux et « moins bon » que ce qu'ils pourraient acheter à t + 1.
Alors comment procéder ? Passons dans le domaine automobile et examinons les
deux marques Audi et Opel. D'un côté, Audi et ses produits « parfaits » et de
l'autre, Opel avec son bagage ultratechnologique : même si le premier clame :
« L'avance par la technologie » et le second : « Nous vivons l'automobile », la
réalité est quelque peu différente.
Audi mise sur la perfection globale du produit en proposant à ses clients une
promesse claire, lisible et crédible : se déplacer dans un véhicule exceptionnel
de justesse et d'harmonie. Et la performance alors ? Dans le cas présent, nous
serions plutôt enclins à parler de priorisation du résultat par rapport à la
performance : c'est le principe du plaisir de conduite servi par une technologie
de haut niveau mais discrète.
Opel, lui, ne joue pas dans ce registre. Le constructeur a en portefeuille
des modèles évolués d'un point de vue technologique, dotés en série ou en option
d'équipements à la pointe du moment (phares adaptatifs, caméra reconnaissant les
panneaux, etc.) Tout cela est effectivement bien alléchant… mais pour quoi
faire ?
Ce qui intéresse le consommateur, c'est avant tout un résultat qualifiable,
une sorte de standard qu'il comprendra instantanément et avec lequel il pourra
s'accorder - et, là, Opel ne délivre pas vraiment de message. Nous sommes
davantage dans un espace de systèmes et de composants tributaires du temps qui
passe, plutôt que dans un univers logique et homogène où le résultat prime le
procédé : on empile les briques technologiques sans proposer de vision globale.
Que constate-t-on au travers de ces exemples ? D'un côté, il y a la
performance dont chaque élément constitutif peut s'apprécier isolément - c'est
tout l'intérêt et la pauvreté des « benchmarks » - et de l'autre un résultat qui
se présente comme une proposition claire, logique et monobloc. C'est un tout.
Il y a donc autant de différences entre une performance et un résultat
qu'entre les notions d'évolution et de progrès : d'un côté des gestes, de
l'autre un mouvement cohérent et positif.
Sur un plan opérationnel, la démarche marketing orientée résultat va
« obliger » l'entreprise à considérer différemment les réels besoins du marché -
c'est là, au passage, que le concept de valeur d'usage prendra tout
son intérêt -, et finalement faire en sorte de rendre la technologie peu ou pas
apparente, dans le but de réduire au maximum les interfaces successives entre le
consommateur et l'obtention du résultat.
Pour en revenir à Apple, la firme était du temps de Steve Jobs un champion
incontesté de cette culture du résultat : le premier slogan de l'iPhone
promettait tout simplement « Internet dans votre poche ». Face à la concurrence
d'un géant technologique comme Samsung, elle doit veiller à garder cette
trajectoire, sans chercher à se battre sur le terrain des résultats.
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