Les TIC (Technologies de l’information et de la communication) peuvent bien sûr contribuer à améliorer l’efficacité opérationnelle des banques. Plus fondamentalement, elles deviennent aussi des leviers clés de la défense et du développement de leur fonds de commerce. Deux innovations parmi d’autres illustrent cette nécessaire mutation.
Première innovation, le "m-paiement" c’est-à-dire l’utilisation du téléphone mobile (d’où le "m") comme moyen de paiement. Les technologies utilisées peuvent être dans ce cas très différentes : SMS, USSD pour des technologies liées aux réseaux mobiles, les systèmes sans contacts comme le NFC jusqu’aux technologies sonores telles que le NSDT.
À la fin l’enjeu est le même : proposer que le
téléphone portable soit un nouveau moyen de paiement pour échanger en quelque
sorte des liquidités de manière ubiquitaire. Si le succès du paiement mobile par
NFC reste encore à démontrer en France (expérimentation de Nice), les résultats
illustrant un véritable usage sont bel et bien là notamment en Asie, en Amérique
Latine et en Afrique.
Ce sont en effet les pays disposant d’un choix moins large en moyen de paiement et d’un faible taux de bancarisation, qui ont été les pionniers. Les usages concernent aussi bien les échanges de personne à personne (le "peer to peer") que l’achat chez un commerçant, le paiement des salaires, des factures voire des impôts.
Seconde innovation clé, l’évolution de ventes de smartphones et les opportunités d’usage en résultant, ainsi que l’appétence avérée pour les services bancaires via mobile (consultation des comptes, virements sur comptes d’épargne en ligne, dépôts de chèques, paiement de factures…) consacre l’inexorable montée en puissance du "mobile banking". Ce phénomène touche aujourd’hui à des degrés divers l’ensemble des régions du globe ; il dépasse la clientèle des jeunes générations et concerne aussi une clientèle aisée, souvent multibancarisée, très profitable pour les banques et appétente à un nouveau type de relation pour un certain nombre de prestations.
Il s’est traduit ces dernières années par de nombreuses initiatives, notamment le développement d’"apps" censées coller aux besoins des clients et pertinentes par rapport à leur contexte d’utilisation, à la localisation du client et au type de terminal utilisé (smartphone, tablette...).
Dans ces deux cas de figure, trois dimensions sont impactées : la vente, la dimension commerciale d’une part ; la relation client ensuite et, enfin, l’organisation même des banques.
Commençons par l’impact sur le modèle commercial. Dans le cas du m-paiement, le s’agit d’un nouveau service associé aux moyens de paiement comme dans le passé, en France sont apparus la carte bancaire ou les GAB/DAB. Il s’agit ici d’avoir son porte-monnaie dans son téléphone. Dans les pays où l’usage s’est le plus développé, les pays émergents, l’intérêt du système est qu’il permet aux banques d’offrir un système de paiement y compris à des clients non bancarisés. C’est donc un service de paiement sans lien nécessaire avec un compte bancaire individuel. Pour les banques c’est un moyen de proposer un service à des populations nouvelles et donc d’étendre son champ commercial.
Dans les pays développés, il s’agit plutôt de proposer une offre de service réellement multicanal en s’adaptant aux usages innovants liés à la mobilité. Plusieurs pays ont ainsi adapté le m-paiement à des services urbains comme le paiement des parkings par exemple. L’usage du téléphone mobile permet aussi d’associer paiement et "ticketing" c’est-à-dire de développer un marketing direct personnalisé lié à l’usage et à la localisation.
S’agissant des "apps", les initiatives en matière d’"Open Innovation" s’accélèrent ; buts recherchés : meilleure personnalisation des produits/services et "time du market" accéléré.
La personnalisation est extrêmement fidélisante : elle rencontre aujourd’hui la volonté d’une partie des clients de créer leur propre expérience bancaire, leur "univers" de besoins en fonction de leurs souhaits. Il est clair que l’expérience attendue en matière de services digitaux se situe clairement en décalage avec l’expérience offerte traditionnellement par les banques, jugée peu réactive et enthousiasmante.
Dès lors, les établissements sont face à un choix important en matière de conception des "apps" : une conception interne sur la base des anticipations des besoins et des usages, ou la "co-création" avec leurs clients en laissant libre cours à leur imagination et source potentielle de services auxquels les banquiers ne pensent pas naturellement. L’expérience récente de co-création du Crédit Agricole, "le CAStore", qui met à disposition des clients leurs propres données bancaires de façon sécurisée, illustre cette dernière démarche.
Elle se caractérise en outre par la mise à disposition d’une plateforme de développement "Software Development Kit" à une force de développement externe à la banque. Si les fondamentaux du succès de la relation client (qualité du contact, réponse au besoin, transparence, réactivité) devaient perdurer, les modèles de vente devraient ainsi progressivement se redessiner autour des lignes suivantes : une redistribution plus simple et économique des fonctions de relation client entre les canaux digitaux et physiques aujourd’hui entamée par la plupart des acteurs, une implication des clients dans la conception des produits et services dépassant largement les traditionnels sondages et "focus groups", enfin une ouverture sécurisée du SI (à travers les APIs) et des données bancaires.
La relation client est bien entendu impactée par ces nouveaux services. Pour le m-paiement, les cas d’usages que nous pouvons étudier actuellement, donc dans les pays émergents, illustrent un élargissement de la base de clients. Le développement est réalisé en commun avec les opérateurs télécoms qui, eux, veulent fidéliser leur clientèle dans le cadre d’un service innovant. Pour les banques, dans des pays où le taux de bancarisation n’excède pas 15 %, il s’agit d’une innovation de conquête de nouveaux clients qui gagnent de l’argent pour acheter en prépayé des flux financiers sans être cible directe pour des comptes bancaires.
Dans les pays européens, la donne est différente. Le m-paiement parait bien perçu, car il associe les banques aux opérateurs télécoms ; or depuis 2009, la confiance est plus grande auprès des opérateurs télécoms que des banques ! C’est donc un moyen, par effet de bord, de récréer ce capital de confiance. Le souci est plutôt avec les 3es acteurs de ce service, les marchands, qui à ce jour sont moins enthousiastes à pousser trop rapidement le modèle.
Outre une perte d’audience et de flux, le risque souvent mis en avant est celui d’une mauvaise qualité de l’apps générant un buzz négatif autour de la marque.
Embarquer les clients dans la création des apps est probablement la voie la plus prometteuse sous réserve qu’elle soit bien encadrée, l’expérience montrant que beaucoup de clients ne demandent pas mieux. La co-création porte en effet l’espoir de ne lancer que des offres au succès annoncé dont la promotion sera en outre en partie assurée par les clients eux-mêmes.
Il s’agit là d’un changement de posture à opérer par les banques, d’une forme d’humilité nouvelle qui prend en compte le fait que l’approche traditionnelle de contrôle de la relation clients et de conception top-down des offres rencontreront par définition des limites très fortes dans l’environnement digital, et ce probablement quelques que soient les sommes investies dans la sophistication des outils CRM et le "big data".
Enfin, l’organisation même des banques est impactée par ses innovations. Nous pouvons mêmes nous demander si ce n’est pas ici l’apport numéro 1 de ces innovations technologiques : faire bouger les mentalités du secteur bancaire ! Pour le m-paiement, l’enjeu organisationnel clé est de faire travailler ensemble des acteurs bancaires et télécoms. L’alchimie n’est pas toujours évidente.
Les deux acteurs se retrouvent sur certaines dimensions notamment l’aspect sécurité. Les services de m-paiement bénéficient de la double sécurité des services bancaires (leur cœur de métier), mais aussi de celles des opérateurs télécoms tant de leur équipement (sécurisation des protocoles télécoms, encodage, processus de contrôle, etc.) que de leur service ("revenue assurance", sécurité des réseaux, cryptage, etc.).
La mise à disposition d’apps n’est qu’une des composantes du virage que les banques que doivent négocier les banques pour s’adapter aux évolutions de leur environnement. Les options stratégiques restent ouvertes : création de banque digitale sous marque propre, création de banque digitale avec marque à connotation décalée comme "Hello Bank" lancée par BNPP à l’échelle européenne, en parallèle des transformations dans les réseaux en terme de format et de rôle des agences.
Les adaptations organisationnelles sous-jacentes commencent à se décliner autour des directions suivantes : passer d’une organisation traditionnelle centrée produit à une organisation ouverte, "client centric" et plus agile ; faire évoluer les pratiques managériales : du faire au "faire faire", évolution du rôle des DSI, maîtrise des enjeux sur la propriété intellectuelle, la transparence et le règlementaire.
Ce sont en effet les pays disposant d’un choix moins large en moyen de paiement et d’un faible taux de bancarisation, qui ont été les pionniers. Les usages concernent aussi bien les échanges de personne à personne (le "peer to peer") que l’achat chez un commerçant, le paiement des salaires, des factures voire des impôts.
Seconde innovation clé, l’évolution de ventes de smartphones et les opportunités d’usage en résultant, ainsi que l’appétence avérée pour les services bancaires via mobile (consultation des comptes, virements sur comptes d’épargne en ligne, dépôts de chèques, paiement de factures…) consacre l’inexorable montée en puissance du "mobile banking". Ce phénomène touche aujourd’hui à des degrés divers l’ensemble des régions du globe ; il dépasse la clientèle des jeunes générations et concerne aussi une clientèle aisée, souvent multibancarisée, très profitable pour les banques et appétente à un nouveau type de relation pour un certain nombre de prestations.
Il s’est traduit ces dernières années par de nombreuses initiatives, notamment le développement d’"apps" censées coller aux besoins des clients et pertinentes par rapport à leur contexte d’utilisation, à la localisation du client et au type de terminal utilisé (smartphone, tablette...).
Dans ces deux cas de figure, trois dimensions sont impactées : la vente, la dimension commerciale d’une part ; la relation client ensuite et, enfin, l’organisation même des banques.
Commençons par l’impact sur le modèle commercial. Dans le cas du m-paiement, le s’agit d’un nouveau service associé aux moyens de paiement comme dans le passé, en France sont apparus la carte bancaire ou les GAB/DAB. Il s’agit ici d’avoir son porte-monnaie dans son téléphone. Dans les pays où l’usage s’est le plus développé, les pays émergents, l’intérêt du système est qu’il permet aux banques d’offrir un système de paiement y compris à des clients non bancarisés. C’est donc un service de paiement sans lien nécessaire avec un compte bancaire individuel. Pour les banques c’est un moyen de proposer un service à des populations nouvelles et donc d’étendre son champ commercial.
Dans les pays développés, il s’agit plutôt de proposer une offre de service réellement multicanal en s’adaptant aux usages innovants liés à la mobilité. Plusieurs pays ont ainsi adapté le m-paiement à des services urbains comme le paiement des parkings par exemple. L’usage du téléphone mobile permet aussi d’associer paiement et "ticketing" c’est-à-dire de développer un marketing direct personnalisé lié à l’usage et à la localisation.
S’agissant des "apps", les initiatives en matière d’"Open Innovation" s’accélèrent ; buts recherchés : meilleure personnalisation des produits/services et "time du market" accéléré.
La personnalisation est extrêmement fidélisante : elle rencontre aujourd’hui la volonté d’une partie des clients de créer leur propre expérience bancaire, leur "univers" de besoins en fonction de leurs souhaits. Il est clair que l’expérience attendue en matière de services digitaux se situe clairement en décalage avec l’expérience offerte traditionnellement par les banques, jugée peu réactive et enthousiasmante.
Dès lors, les établissements sont face à un choix important en matière de conception des "apps" : une conception interne sur la base des anticipations des besoins et des usages, ou la "co-création" avec leurs clients en laissant libre cours à leur imagination et source potentielle de services auxquels les banquiers ne pensent pas naturellement. L’expérience récente de co-création du Crédit Agricole, "le CAStore", qui met à disposition des clients leurs propres données bancaires de façon sécurisée, illustre cette dernière démarche.
Elle se caractérise en outre par la mise à disposition d’une plateforme de développement "Software Development Kit" à une force de développement externe à la banque. Si les fondamentaux du succès de la relation client (qualité du contact, réponse au besoin, transparence, réactivité) devaient perdurer, les modèles de vente devraient ainsi progressivement se redessiner autour des lignes suivantes : une redistribution plus simple et économique des fonctions de relation client entre les canaux digitaux et physiques aujourd’hui entamée par la plupart des acteurs, une implication des clients dans la conception des produits et services dépassant largement les traditionnels sondages et "focus groups", enfin une ouverture sécurisée du SI (à travers les APIs) et des données bancaires.
La relation client est bien entendu impactée par ces nouveaux services. Pour le m-paiement, les cas d’usages que nous pouvons étudier actuellement, donc dans les pays émergents, illustrent un élargissement de la base de clients. Le développement est réalisé en commun avec les opérateurs télécoms qui, eux, veulent fidéliser leur clientèle dans le cadre d’un service innovant. Pour les banques, dans des pays où le taux de bancarisation n’excède pas 15 %, il s’agit d’une innovation de conquête de nouveaux clients qui gagnent de l’argent pour acheter en prépayé des flux financiers sans être cible directe pour des comptes bancaires.
Dans les pays européens, la donne est différente. Le m-paiement parait bien perçu, car il associe les banques aux opérateurs télécoms ; or depuis 2009, la confiance est plus grande auprès des opérateurs télécoms que des banques ! C’est donc un moyen, par effet de bord, de récréer ce capital de confiance. Le souci est plutôt avec les 3es acteurs de ce service, les marchands, qui à ce jour sont moins enthousiastes à pousser trop rapidement le modèle.
Outre une perte d’audience et de flux, le risque souvent mis en avant est celui d’une mauvaise qualité de l’apps générant un buzz négatif autour de la marque.
Embarquer les clients dans la création des apps est probablement la voie la plus prometteuse sous réserve qu’elle soit bien encadrée, l’expérience montrant que beaucoup de clients ne demandent pas mieux. La co-création porte en effet l’espoir de ne lancer que des offres au succès annoncé dont la promotion sera en outre en partie assurée par les clients eux-mêmes.
Il s’agit là d’un changement de posture à opérer par les banques, d’une forme d’humilité nouvelle qui prend en compte le fait que l’approche traditionnelle de contrôle de la relation clients et de conception top-down des offres rencontreront par définition des limites très fortes dans l’environnement digital, et ce probablement quelques que soient les sommes investies dans la sophistication des outils CRM et le "big data".
Enfin, l’organisation même des banques est impactée par ses innovations. Nous pouvons mêmes nous demander si ce n’est pas ici l’apport numéro 1 de ces innovations technologiques : faire bouger les mentalités du secteur bancaire ! Pour le m-paiement, l’enjeu organisationnel clé est de faire travailler ensemble des acteurs bancaires et télécoms. L’alchimie n’est pas toujours évidente.
Les deux acteurs se retrouvent sur certaines dimensions notamment l’aspect sécurité. Les services de m-paiement bénéficient de la double sécurité des services bancaires (leur cœur de métier), mais aussi de celles des opérateurs télécoms tant de leur équipement (sécurisation des protocoles télécoms, encodage, processus de contrôle, etc.) que de leur service ("revenue assurance", sécurité des réseaux, cryptage, etc.).
La mise à disposition d’apps n’est qu’une des composantes du virage que les banques que doivent négocier les banques pour s’adapter aux évolutions de leur environnement. Les options stratégiques restent ouvertes : création de banque digitale sous marque propre, création de banque digitale avec marque à connotation décalée comme "Hello Bank" lancée par BNPP à l’échelle européenne, en parallèle des transformations dans les réseaux en terme de format et de rôle des agences.
Les adaptations organisationnelles sous-jacentes commencent à se décliner autour des directions suivantes : passer d’une organisation traditionnelle centrée produit à une organisation ouverte, "client centric" et plus agile ; faire évoluer les pratiques managériales : du faire au "faire faire", évolution du rôle des DSI, maîtrise des enjeux sur la propriété intellectuelle, la transparence et le règlementaire.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire